Témoignages de Gazaouis : La survie qui s’organise au jour le jour dans l’enfer de Gaza – partie 537 / 3.10 – Un peuple qui continue d’attendre… la délivrance

Brigitte Challande, 4 octobre 2025.- Témoignage d’Abu Amir, le 3 octobre, sur la situation militaire et humanitaire sur le terrain dans la bande de Gaza.

« Au cœur de la bande de Gaza, où la terre se resserre sur plus de deux millions d’habitants, la population vit aujourd’hui entre un mince espoir de voir la guerre s’achever et une peur constante de la poursuite de l’effusion de sang. Ils attendent la moindre nouvelle porteuse d’espoir, une initiative qui mettrait fin à cette hémorragie sans fin. Chaque jour qui passe ajoute de nouvelles pages de destruction et de mort au registre de la tragédie, tandis que continuent les cris des civils qui n’ont plus de refuge et qui n’ont d’autre recours que la prière pour que cette guerre prenne fin bientôt et que soit levée cette épreuve prolongée. Malgré les discours sur des plans internationaux et des initiatives de cessez-le-feu, la réalité sur le terrain dit le contraire : la souffrance s’intensifie et l’agression redouble.

La scène militaire : une escalade sans précédent

Sur le plan militaire, Israël poursuit sa guerre ouverte contre le territoire. Ses chars ont franchi la frontière et atteint les abords puis le centre de la ville de Gaza, un spectacle qui terrorise la population. Habitués à voir les blindés rôder autour de leurs villes, ils ne s’attendaient pas à une incursion d’une telle profondeur. Cette avancée a été accompagnée de bombardements aériens et d’artillerie intenses, si bien que le bruit des explosions ne cesse jour et nuit, recouvrant le ciel de fumée et de flammes et couvrant la terre de gravats. Ce qui caractérise cette vague d’escalade, c’est qu’elle ne vise pas seulement des objectifs militaires ou sécuritaires, mais englobe tout : maisons de civils, écoles, mosquées et même hôpitaux. Chaque obus tiré laisse derrière lui des dizaines de morts et de blessés, ainsi que des familles entières plongées dans le désarroi, leurs habitations détruites sur leurs têtes.

Ciblage généralisé des zones civiles

Aucune zone de Gaza n’a été épargnée par les bombardements israéliens. Les quartiers résidentiels se sont transformés en ruines, les rues autrefois animées sont désormais vides, jonchées de débris. Les marchés populaires, où les habitants cherchaient un peu de nourriture, ont été frappés à plusieurs reprises, se changeant en scènes sanglantes où se mêlent cris des victimes et sirènes d’ambulances. Les mosquées, lieux de refuge spirituel, ont été détruites, les écoles, transformées en abris pour les déplacés, sont devenues des cibles faciles. Même les centres de secours n’ont pas échappé aux tirs, rendant l’arrivée de l’aide humanitaire extrêmement difficile.

Le bombardement d’une tente de déplacés dans l’enceinte de l’hôpital des martyrs d’Al-Aqsa, à Deir al-Balah, n’était pas un accident, mais un message brutal : la guerre n’épargne personne, pas même ceux qui se sont réfugiés derrière les murs d’un hôpital ou sous une tente de fortune.

Gaza-ville : épicentre des événements et cible principale

Gaza-ville, capitale administrative et politique du territoire, est aujourd’hui la plus exposée aux attaques. Densément peuplée, centre économique et culturel, elle est devenue un champ de bataille à ciel ouvert. Ses artères principales, comme la rue Al-Wahda ou la rue Omar Al-Mukhtar, jadis animées, sont aujourd’hui criblées de cratères et encombrées de décombres. Au cœur de la ville, les bâtiments détruits donnent l’impression qu’un séisme les a frappés. Les habitants vivent dans une terreur permanente : les explosions résonnent sans répit, l’odeur de poudre et de fumée se mêle aux cris des femmes et des enfants. La vie quotidienne est complètement paralysée : pas d’écoles, pas de marchés, pas même de centres de santé capables de fonctionner.

Des quartiers entiers, comme Choujaïya, At-Touffah ou As-Sabra, sont devenus des symboles de destruction, avec des centaines de morts et de blessés et des milliers de familles déplacées. Gaza n’est plus une ville de vie, mais une ville assiégée par la mort. Pourtant, malgré tout, elle reste debout, ses habitants s’accrochant à l’espoir et à la survie face à ce qu’ils considèrent comme une véritable guerre d’extermination.

La catastrophe humanitaire : déplacement et privation

La situation humanitaire s’assombrit de jour en jour. Des dizaines de milliers de familles ont fui la ville de Gaza vers le centre et le sud de la bande, quittant leurs maisons détruites ou menacées, pour vivre à ciel ouvert ou dans des écoles surpeuplées, sans eau, sans électricité et avec très peu de nourriture. Des milliers de familles n’ont même pas obtenu une tente, s’installant directement au sol, utilisant des morceaux de tissu ou de plastique pour protéger leurs enfants du soleil brûlant et du froid nocturne. Dans les lieux de déplacement, la tragédie humaine est palpable : des enfants affamés cherchent de quoi manger, des femmes portent leurs enfants malades sans trouver de médicaments, des vieillards gisent à même le sol sans couverture. Dans un contexte d’insécurité totale, les déplacés n’ont d’autre choix que la patience et la prière.

Souffrance accrue des enfants et des femmes

Les enfants, qui représentent plus de la moitié de la population de Gaza, incarnent le visage le plus douloureux de cette tragédie. Des milliers ont perdu leurs familles ou leurs maisons et vivent désormais dans la peur et le traumatisme. Beaucoup ne dorment plus, terrorisés, et éclatent en sanglots à chaque détonation.

Quant aux femmes, elles supportent un fardeau écrasant. Elles doivent chercher à nourrir et abreuver leurs enfants malgré le manque extrême de ressources, tout en essayant de les réconforter et de les protéger. Les récits des femmes de Gaza révèlent la part sombre de cette guerre : des mères devenues héroïnes du quotidien, luttant pour maintenir leurs familles en vie.

Les hôpitaux sous les bombes

Le système de santé de Gaza est au bord de l’effondrement. Les hôpitaux ne peuvent plus accueillir de nouveaux blessés. Les médecins travaillent dans des conditions inhumaines, réalisant parfois des opérations sans anesthésie complète par manque de médicaments. Certains hôpitaux sont complètement hors service, soit en raison de bombardements directs, soit par pénurie de carburant pour faire tourner les générateurs.

La scène à l’intérieur est terrifiante : des cadavres entassés dans les couloirs, des blessés allongés au sol attendant une chirurgie urgente, des médecins épuisés au bord de la rupture. L’Organisation mondiale de la santé a multiplié les avertissements quant à une catastrophe humanitaire imminente, mais la réalité sur place dépasse les pires prévisions.

Gaza entre désespoir et espoir

Malgré tout, les habitants de Gaza s’accrochent à un mince espoir de voir cette tragédie prendre fin. Sur leurs visages se lisent fatigue et désespoir, mais dans leurs cœurs brille une étincelle de résilience qui refuse de s’éteindre. Ils croient que la vie reprendra un jour, même au milieu des ruines, et que leur voix doit parvenir au monde entier comme témoignage de ce qu’ils subissent. L’espoir, pour eux, n’est pas un luxe mais un outil de survie. À chaque instant, ils élèvent leurs prières pour que cesse la guerre, pour que les enfants retrouvent leurs écoles, pour dormir une nuit sans peur, pour s’éveiller le matin sans découvrir qu’un être cher a disparu.

La situation dans la bande de Gaza a dépassé le cadre d’une guerre conventionnelle pour devenir une tragédie humanitaire totale. La scène militaire révèle une destruction massive, et la scène humanitaire crie une souffrance insoutenable. Gaza-ville, centre vital du territoire, est devenue à la fois symbole de résistance et de destruction, tandis que la guerre continue d’ôter des vies sans relâche.

Et tandis que le sang continue de couler, la voix des victimes et des déplacés résonne plus fort que tout discours politique : c’est la voix d’un peuple qui aspire à la fin d’une guerre dévastatrice, d’un peuple qui souhaite simplement retourner chez lui, même au milieu des décombres, car vivre parmi les ruines est moins cruel que rester à découvert, sans abri ni dignité. »


Retrouvez l’ensemble des témoignages d’Abu Amir et Marsel :

*Abu Amir Mutasem Eleïwa est coordinateur des Projets paysans depuis 2016 au sud de la bande de Gaza et correspondant de l’Union Juive Française pour la Paix.

*Marsel Alledawi est responsable du Centre Ibn Sina du nord de la bande de Gaza, centre qui se consacre au suivi éducatif et psychologique de l’enfance.

Tous les deux sont soutenus par l’UJFP en France.

Cliquez ici pour consulter les Témoignages du 20 novembre 2023 au 5 janvier 2025 (partie 1 à 268)

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Partie 393 : 10 mai. Partie 394 : 11 mai. Partie 395 : 11 mai (1). Partie 396 : 12 mai. Partie 397 : 13 mai. Partie 398 : 14 mai. Partie 399 : 15 mai. Partie 400 : 16 mai. Partie 401 : 16 mai (1). Partie 402 : 17 mai. Partie 403 : 18 mai. Partie 404 : 18 mai (1). Partie 405 : 20 mai. Partie 406 : 21 mai. Partie 407 : 22 mai. Partie 408 : 22 mai (1). Partie 409 : 23 mai. Partie 410 : 24 mai. Partie 411 : 25 mai. Partie 412 : 25 mai (1). Partie 413 : 27 mai. Partie 414 : 27 mai (1). Partie 415 : 28 mai. Partie 416 : 29 mai. Partie 417 : 30 mai. Partie 418 : 1er juin. Partie 419 : 1er juin (1). Partie 420 : 31 mai et 2 juin. Partie 421 : 2 juin (1). Partie 422 : 3 juin. Partie 423 : 4 juin. Partie 424 : 5 juin. Partie 425 : 6 juin. Partie 426 : 6 juin (1). Partie 427 : 7 juin. Partie 428 : 8 juin. Partie 429 : 9 juin. Partie 430 : 10 juin. Partie 431 : 11 juin. Partie 432 : 12 juin. Partie 433 : 13 juin. Partie 434 : 14 juin. Partie 435 : 15 juin. Partie 436 : 16 juin. Partie 437 : 17 juin. Partie 438 : 18 juin. Partie 439 : 19 juin. Partie 440 : 20 juin. Partie 441 : 21-22 juin. Partie 442 : 24 juin. Partie 443 : 25 juin. Partie 444 : 26 juin. Partie 445 :  : 27-28 juin. Partie 446 : 27 juin. Partie 447 : 30 juin. Partie 448 : 1er juillet. Partie 449 : 2 juillet. Partie 450 : 2 juillet(1). Partie 451 : 3 juillet. Partie 452 : 4 juillet. Partie 453 : 5 juillet. Partie 454 : 6 juillet. Partie 455 : 7 juillet. Partie 456 : 7 juillet (1). Partie 457 : 9 juillet. Partie 458 : 10 juillet. Partie 459 : 11 juillet. Partie 460 : 12 juillet. Partie 461 : 13 juillet. Partie 462 : 14 juillet. Partie 463 : 16 juillet. Partie 464 : 17 juillet. Partie 465 : 18 juillet. Partie 466 : 19 juillet. Partie 467 : 20 juillet. Partie 468 : 20 juillet (1). Partie 469 : 21 juillet. Partie 470 : 22 juillet. Partie 471 : 23 juillet. Partie 472 : 24 juillet. Partie 473 : 25 juillet 2025. Partie 474 : 26 juillet. Partie 475 : 27 juillet. Partie 476 : 28 juillet. Partie 477 : 30 juillet. Partie 478 : 1er août. Partie 479 : 2 août. Partie 480 : 3 août. Partie 481 : 3-4 août. Partie 482 : 5 août. Partie 483 : 7 août. Partie 484 : 8 août. Partie 485 : 9 août. Partie 486 : 10 août. Partie 487 : 11 août. Partie 488 : 12 août. Partie 489 : 13 août. Partie 490 : 14 août. Partie 491 : 15 août. Partie 492 : 16 août 2025. Partie 493 : 18 août 2025. Partie 494 : 20 août. Partie 495 : 21 août. Partie 496 : 22 août. Partie 497 : 23 août. Partie 498 : 23 août (1). Partie 499 : 24 août. Partie 500 : 25 août. Partie 501 : 26 août. Partie 502 : 27 août. Partie 503 : 28 août. Partie 504 : 29 août. Partie 505 : 30 août. Partie 506 : 31 août. Partie 507 : 31 août/1er septembre. Partie 508 : 3 septembre. Partie 509 : 3 septembre (1). Partie 510 : 4 septembre. Partie 511 : 5 septembre. Partie 512 : 6 septembre. Partie 513 : 6 septembre (1). Partie 514 : 7 septembre. Partie 515 : 9 septembre. Partie 516 : 10 septembre. Partie 517 : 11 septembre. Partie 518 : 12-13 septembre. Partie 519 : 14 septembre. Partie 520 : 15 septembre. Partie 521 : 16 septembre. Partie 522 : 17 septembre. Partie 523 : 18 septembre. Partie 524 : 19 septembre. Partie 525 : 20 septembrePartie 526 : 20 septembre (1). Partie 527 : 21 septembre. Partie 528 : 22 septembre. Partie 529 : 22 septembre (1). Partie 530 : 23 septembre. Partie 531 : 24 septembre. Partie 532 : 25 septembre. Partie 533 : 27 septembre. Partie 534 : 28 septembre. Partie 535 : 29 septembre. Partie 536 : 2 octobre.

Pour participer à la collecte « Urgence Guerre à Gaza » : HelloAsso.com
Les témoignages sont également publiés sur UJFPAltermidi et sur Le Poing.