Partager la publication "Témoignages de Gazaouis : La survie qui s’organise au jour le jour dans l’enfer de Gaza – partie 454 / 6 juillet – Etreindre la vie malgré la douleur"
Brigitte Challande, 7 juillet 2025. Compte rendu hebdomadaire de l’atelier de soutien psychologique pour les femmes à Deir al-Balah, le 6 juillet.
« Dans les moments difficiles que traversent les femmes de Gaza, sous le poids des bombardements, du déplacement et de la perte des êtres chers, l’âme a un besoin profond d’un instant de vérité avec soi-même : un moment de silence pour réorganiser ce qui s’est dispersé, un moment pour se reconnecter à soi. C’est dans cet esprit que les équipes psychologiques et sociales de l’UJFP ont organisé une session élargie de soutien psychologique intitulée : « Quand nous étreignons la vie malgré la douleur », pour un groupe de femmes déplacées dans le camp Al-Asdiqaa à l’ouest de Deir al-Balah, au centre de la bande de Gaza.
Cette session avait pour objectif d’alléger le fardeau psychologique et de fournir un espace sécurisé où les émotions peuvent être accueillies et la résilience retrouvée. Les femmes étaient assises en cercle, croisant les regards et les larmes, dans un silence mêlé d’espérance. La psychologue a parlé de la signification de la sécurité intérieure, et de la manière dont on peut la retrouver, même en vivant les scènes les plus dures.
« Respire… Tu es en vie »
La session a débuté par un exercice de respiration profonde intitulé : « Mon souffle est toujours là ». Les femmes étaient invitées à poser leurs mains sur leur ventre et à inspirer lentement comme si elles remplissaient leur cœur de lumière, puis à expirer doucement comme si elles libéraient leurs douleurs par les fenêtres. Après l’exercice les femmes ont commencé à exprimer ce qu’elles ressentaient. L’une a dit : « J’avais l’impression de ne plus respirer depuis des semaines… comme si mon corps était fermé sur lui-même… C’est mon premier vrai souffle depuis que j’ai perdu mon mari. »
Ensuite, l’exercice de « Conscience corporelle », où la psychologue a invité les participantes à identifier les zones de tension dans leur corps : les épaules crispées, les mains tremblantes, le cœur lourd. Elle leur a demandé de poser leurs mains sur ces zones et de leur parler intérieurement : « Je te vois, je suis là. Parle, la tristesse ne vit pas dans le silence ».
Une grande partie de la session a été consacrée à la libération des émotions. Chaque femme, si elle le souhaitait, pouvait partager quelque chose qu’elle n’avait pas pu dire depuis le début de la guerre. Les récits se sont enchaînés, lourds comme la braise. L’une d’elles a raconté comment sa petite fille pleurait en silence chaque nuit pour ne pas alourdir le cœur de sa mère. Une autre a parlé de sa culpabilité de ne pouvoir offrir à ses enfants qu’une couverture et un morceau de pain.
« La chanson de la vie malgré tout »
Dans un moment inattendu, l’une des participantes a entonné une vieille chanson que sa mère lui chantait dans son enfance. Sa voix, d’abord tremblante et timide, est devenue un pont entre les cœurs, et les autres femmes l’ont rejointe, d’abord timidement, puis avec force et conviction. Ce fut l’un des moments les plus profonds de connexion et de guérison, quand le chant devient un acte de résistance et une étreinte à la vie.
« Pour mes enfants… je reste »
La session s’est orientée ensuite vers le rôle de la maternité en temps de crise. Il a été souligné que les mères ne sont pas seulement une source de protection matérielle, mais aussi émotionnelle. Une activité intitulée « Message à mon enfant », dire une phrase simple adressée à leurs enfants : « Je suis là, je ne t’abandonnerai pas », « Je t’aime comme tu es, même quand tu as peur » a rempli l’espace d’une chaleur humaine indescriptible.
« Un vœu dans le cœur »
La session s’est clôturée par un moment de méditation silencieuse. Chaque femme a fermé les yeux, posé la main sur son cœur et formulé un vœu simple : pour son enfant, pour sa voisine, pour elle-même. Ensuite, toutes ont posé la main sur l’épaule de celle qui était à côté, en un geste symbolique de soutien mutuel. Un petit rituel de réconfort au cœur d’un océan de douleur.
À la fin de la session, Les femmes ont compris, comme l’a dit l’une d’elles, que « la fragilité ne nous empêche pas d’être une lumière pour les autres, même entre les bombardements et la peur, nous pouvons créer un instant pour dire : nous sommes là, nous aimons encore, nous vivons encore. »
Vidéo ICI.
Retrouvez l’ensemble des témoignages d’Abu Amir et Marsel :
*Abu Amir Mutasem Eleïwa est coordinateur des Projets paysans depuis 2016 au sud de la bande de Gaza et correspondant de l’Union Juive Française pour la Paix.
*Marsel Alledawi est responsable du Centre Ibn Sina du nord de la bande de Gaza, centre qui se consacre au suivi éducatif et psychologique de l’enfance.
Tous les deux sont soutenus par l’UJFP en France.
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Pour participer à la collecte « Urgence Guerre à Gaza » : HelloAsso.com
Les témoignages sont également publiés sur UJFP, Altermidi et sur Le Poing.