Partager la publication "Témoignages de Gazaouis : La survie qui s’organise au jour le jour dans l’enfer de Gaza – partie 389 / 7 mai – Quand le monde devient complice du génocide"
Brigitte Challande, 7 mai 2025. Gaza entre massacres et silence : la famine sévit à Gaza au point que les médias ne relaient même plus les bombardements meurtriers abominables que continue de perpétrer l’armée israélienne. L’horreur dépasse toute représentation, quotidienne, inconcevable, Abu Amir continue de la raconter.
« Chaque jour, Gaza meurt. Non pas une seule fois, mais mille fois. Elle meurt sous les bombardements, sous la faim, sous les décombres de ses maisons, et sous le silence du monde. Mais hier, elle est morte d’une manière encore plus barbare : un nouveau massacre dans le camp de Bureij, perpétré par la machine de guerre israélienne, de sang-froid, sans la moindre considération pour la vie humaine.

6 mai 2025. Les survivants du massacre israélien qui a tué 20 civils dans l’école Abu Hamisa, dans le camp de réfugiés de al-Bureij, inspectent les décombres à la recherche de survivants.
Ce jour noir, il n’y avait ni armes à Bureij, ni résistance, ni site militaire. Il n’y avait que des êtres humains : des enfants dormant avec des rêves déchirés, des mères étreignant les restes d’un espoir, des familles déplacées réfugiées dans une école censée les protéger de la mort – et c’est pourtant la mort qui les a frappées, venue du plafond. Des missiles ont visé une école bondée de déplacés, causant un massacre atroce : 29 civils tués, principalement des femmes et des enfants, et des dizaines de blessés restés coincés sous les décombres pendant des heures, sans secours, car même les ambulances sont prises pour cibles dès qu’elles approchent.
Ce massacre n’était pas le premier, et ne sera pas le dernier. Depuis le début de l’agression en octobre 2023, Israël a utilisé tous les moyens possibles pour tuer : bombarder des maisons sur leurs habitants, affamer les civils, viser hôpitaux et écoles. Plus de 171.000 morts et blessés jusqu’à présent, et la « communauté internationale » continue de discuter de « projets de trêve » qui ne sont que de l’encre sur du papier.
Face à ces crimes, le vrai visage de ce qu’on appelle « communauté internationale » se révèle : un monde sourd, aveugle, complice. Un silence honteux qui ne peut plus être interprété que comme une participation explicite au crime. Des milliers de frappes, des milliers de morts, et aucune réunion d’urgence aboutissant à une décision dissuasive. Les civils sont massacrés sous les yeux du monde, et le Conseil de Sécurité reste inerte. Les initiatives se succèdent, mais toutes échouent dès le premier veto américain ou la complicité européenne.
Pire encore, les peuples du monde crient. De New York à Londres, de Cape Town à Tokyo, des millions manifestent pour réclamer la fin du génocide à Gaza. On brandit des pancartes « Save Gaza », on fait tomber des statues coloniales. Mais ces voix sont réprimées. À Paris, les pancartes sont arrachées des mains des manifestants. À Berlin, des militants sont arrêtés. À Londres, les journalistes révélant les crimes sont pourchassés. Même la conscience mondiale est assassinée, non pas par des bombes, mais par la censure.
Et pourtant, la conscience populaire a changé. La cause palestinienne n’est plus un simple sujet de journal télévisé : elle est devenue une affaire de conscience mondiale. Des millions de personnes comprennent désormais que ce qui se passe n’est pas un « conflit », mais une occupation, un déplacement forcé, un meurtre organisé, un nettoyage ethnique, un viol systématique de la terre et de l’être humain. Israël ne parvient plus à vendre son récit, et l’Occident ne peut plus justifier son silence. La prise de conscience des peuples est la première victoire, même temporaire.
Sur la scène arabe, la dignité est absente. Les pays arabes, pourtant capables d’exercer des pressions, restent silencieux. Aucune mesure diplomatique sérieuse, aucune expulsion d’ambassadeurs, aucune rupture de relations. Rien que des communiqués fades, des déclarations creuses. Certains régimes arabes, en particulier ceux qui ont normalisé leurs relations, ne se contentent plus de se taire – ils deviennent complices, soit par leur silence, soit en fournissant une couverture politique. Les peuples arabes ont honte de leurs gouvernements et savent que Gaza est abandonnée, non seulement par l’armée israélienne, mais aussi par la complicité de ses « frères ».
Les innombrables propositions de trêve ont toutes échoué, parce que la communauté internationale ne cherche pas à arrêter la guerre, mais à la gérer. Elle veut que Gaza saigne plus discrètement, pas qu’elle vive. Il n’y a ni volonté réelle de paix, ni position internationale unie, ni volonté politique d’arrêter Israël. Toutes les propositions naissent mortes, car Washington veille à maintenir un « équilibre » dans les tueries, tandis qu’Israël construit sur les ruines son projet d’effacement total de Gaza.
Alors, qu’attend le monde ? Que tous les habitants de Gaza soient tués ? Que l’on annonce un jour qu’il n’y a plus de peuple à Gaza ? Va-t-on continuer à présenter des propositions pendant qu’Israël progresse dans son plan pas à pas ? Réaliserons-nous trop tard que nous avons été témoins d’un génocide sans jamais réagir ?
Il est désormais évident qu’Israël ne mène pas une guerre militaire, mais une campagne
d’extermination. Et la société israélienne qui se réjouit à la télévision des images de morts, qui applaudit aux bombardements, est une société qui a perdu tout lien avec les valeurs humaines, elle a sombré dans une barbarie au-delà des mots. Une société qui considère le meurtre comme une réussite, les bombardements comme des actes héroïques, le blocus comme une punition collective justifiée. C’est là le vrai visage de la sauvagerie, pas seulement chez les généraux, mais dans toute une société.
Et Gaza, au milieu de tout cela, ne possède que sa résilience. Dans les tentes des réfugiés, parmi les ruines des écoles, dans les bras des mères endeuillées, il reste une sorte de dernier souffle.
Un souffle qui ne tient pas d’une arme, mais qui refuse de céder. Gaza ne meurt pas facilement. Même en étant massacrée, elle lève la tête pour dire : la mémoire ne sera pas effacée, et la vérité ne sera pas violée.
À la fin, une question demeure sans réponse :
Combien de massacres faut-il pour que le monde se réveille ?
Combien d’enfants doivent être tués avant qu’on dise : assez ?
Quand l’humanité triomphera-t-elle de toute cette laideur ?
Le temps parlera, mais Gaza, comme toujours, paiera le prix en premier. »
Retrouvez l’ensemble des témoignages d’Abu Amir et Marsel :
*Abu Amir Mutasem Eleïwa est coordinateur des Projets paysans depuis 2016 au sud de la bande de Gaza et correspondant de l’Union Juive Française pour la Paix.
*Marsel Alledawi est responsable du Centre Ibn Sina du nord de la bande de Gaza, centre qui se consacre au suivi éducatif et psychologique de l’enfance.
Tous les deux sont soutenus par l’UJFP en France.
Cliquez ici pour consulter les Témoignages du 20 novembre 2023 au 5 janvier 2025.
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Pour participer à la collecte « Urgence Guerre à Gaza » : HelloAsso.com
Les témoignages sont également publiés sur UJFP, Altermidi et sur Le Poing.