Lettre ouverte pour défendre la démocratie et les droits de la société civile palestinienne

Funders for Palestine, 16 novembre 2021. Le 19 octobre 2021, six organisations palestiniennes de premier plan ont été qualifiées d'”organisations terroristes” par le ministre israélien de la Défense, Benny Gantz. Cette désignation criminalise le travail de ces organisations et permet la fermeture de leurs bureaux, la saisie de dossiers et d’équipements et l’arrestation de membres du personnel, tout en visant à criminaliser ceux qui les financent ou les soutiennent d’autres manières.

Les fondations et les donateurs internationaux jouent un rôle essentiel en soutenant les communautés en première ligne de la promotion de la justice sociale à travers le monde, en particulier dans les régions où le bien-être et les droits de l’homme des populations marginalisées sont les plus menacés. En Palestine, les organisations de la société civile jouent un rôle essentiel dans la fourniture de services, la défense des droits de l’homme, la protection des terres et des ressources en eau, et la dénonciation de l’occupation et des violations continuelles du droit international. Les six groupes criminalisés par le décret de Gantz sont les suivants :

* Addameer Prisoner Support and Human Rights a été fondée en 1991 pour apporter un soutien juridique aux prisonniers, collecter des données sur les arrestations et les détentions administratives, et œuvrer pour mettre fin à la torture et aux violations des droits des prisonniers. Récemment, elle a mis en lumière une grève de la faim des prisonniers, qui, dans le cas d’un prisonnier, a duré plus de 90 jours.

* Al Haq, la plus ancienne organisation palestinienne de défense des droits de l’homme, a été créée en 1979 « pour protéger et promouvoir les droits de l’homme et l’État de droit dans le territoire palestinien occupé. » Elle a joué un rôle primordial en portant les violations israéliennes du droit international devant la Cour pénale internationale, qui a ouvert son enquête officielle sur les crimes de guerre présumés d’Israël en mars 2021.

*  Bisan Center for Research and Development a été fondé en 1989 « pour contribuer à la construction d’une société démocratique réelle ». À travers ses programmes, le Bisan Center défend les droits civils, les droits de l’homme et les droits socio-économiques.

* Defense for Children International – Palestine est la section nationale du mouvement international des droits de l’enfant basé à Genève. Depuis 1991, elle « enquête, documente et expose les graves violations des droits de l’homme commises à l’encontre des enfants » et leur fournit des services juridiques. Ses recherches ont servi de base à la rédaction du projet de loi du député Betty McCollum intitulé “Defending the Human Rights of Palestinian Children and Families Living under Israeli Military Occupation Act” (H.R. 2590).

* Union of Agricultural Work Committees (Syndicat des comités de travail agricole), la plus grande institution agricole de Palestine, a été créée en 1986 pour améliorer la situation des agriculteurs et des pêcheurs palestiniens. Elle a joué un rôle essentiel pour faire face à l’expansion des colonies israéliennes et au déplacement des agriculteurs de leurs terres, un processus qui s’est accéléré ces dernières années. L’UAWC a reçu le prestigieux prix Équateur en 2014 par l’Agence des Nations unies pour le développement pour son travail exceptionnel sur l’agriculture durable et la préservation des semences locales grâce à sa banque de semences.

* Union of Palestinian Women’s Committees (Syndicat des comités de femmes palestiniennes) a été créée en 1980 en tant qu’organisation féministe pour donner aux femmes les moyens de jouer un rôle accru dans la vie sociale, politique et économique, et de faire avancer la lutte pour la dignité et la libération.

L’attaque ciblée contre six des principales organisations de la société civile en Palestine est une tentative flagrante de faire taire et de criminaliser la contestation des violations des droits humains du gouvernement israélien. Selon le Bureau des droits de l’homme des Nations unies dans le territoire palestinien occupé, « ces désignations sont le dernier développement d’une longue campagne de stigmatisation contre ces organisations et d’autres, portant atteinte à leur capacité de mener à bien leur travail essentiel. » Un groupe d’experts des droits de l’homme de l’ONU a ajouté : « Cette désignation est une attaque frontale contre le mouvement palestinien des droits de l’homme, et contre les droits de l’homme partout dans le monde. »

Nous défendons les droits des organisations de la société civile palestinienne à mener à bien leur travail crucial. Nous défendons les valeurs clés que sont la liberté d’expression, le pouvoir de la solidarité et le droit de tous à la justice et à la dignité.

La menace supplémentaire de criminaliser ceux qui prennent la défense de ces organisations (y compris en les finançant) est une attaque directe contre la liberté et l’objectif des bailleurs de fonds mondiaux de se solidariser avec la Palestine. En tant que bailleurs de fonds investis dans les droits de l’homme, nous refusons d’être réduits au silence ou intimidés. Nous menons des processus minutieux, avec toute la diligence raisonnable, dans l’octroi de nos subventions, y compris dans l’accompagnement des projets. Nos décisions de financement appartiennent à nos conseils d’administration et à notre conscience, et non au ministère de la Défense israélien.

En outre, des enquêtes européennes et américaines rigoureuses ont réfuté des allégations antérieures contre ces organisations et d’autres organisations de la société civile palestinienne. En réponse à cette dernière initiative du gouvernement israélien, l’Union européenne a affirmé que : « Les allégations antérieures de mauvaise utilisation des fonds de l’UE en relation avec certaines de nos OSC partenaires palestiniennes n’ont pas été corroborées (…). L’UE continuera à défendre le droit international et à soutenir les organisations de la société civile qui ont un rôle à jouer dans la promotion du droit international, des droits de l’homme et des valeurs démocratiques. »

Human Rights Watch et Amnesty International, qui travaillent en étroite collaboration avec un grand nombre de ces groupes, ont déclaré dans un communiqué commun :

Cette décision lamentable et injuste est une attaque du gouvernement israélien contre le mouvement international des droits humains. Pendant des décennies, les autorités israéliennes ont systématiquement cherché à museler la surveillance des droits humains et à punir ceux qui critiquent son régime répressif à l’égard des Palestiniens. Alors que les membres du personnel de nos organisations ont fait l’objet d’expulsions et d’interdictions de voyager, les défenseurs palestiniens des droits humains ont toujours été les plus touchés par la répression. Cette décision constitue une escalade alarmante qui menace de mettre un terme au travail des organisations de la société civile les plus importantes de Palestine. L’incapacité de la communauté internationale, depuis des décennies, à dénoncer les graves violations des droits humains commises par Israël et à imposer des conséquences significatives à cet égard a enhardi les autorités israéliennes à agir de manière aussi éhontée.

Dans cet esprit, nous sommes solidaires des organisations de la société civile en Palestine et demandons que :

  1. Les gouvernements des États-Unis, de l’Union européenne et d’autres pays dénoncent toutes les campagnes de dénigrement contre les organisations de la société civile palestinienne, fassent pression sur le gouvernement israélien pour qu’il annule immédiatement et complètement la désignation de Gantz de soi-disant “organisation terroriste” contre ces 6 organisations palestiniennes de défense des droits de l’homme ;
  2. Les États-Unis, l’Union européenne et d’autres gouvernements tiennent le gouvernement israélien responsable de son adhésion au droit international et aux normes relatives aux droits de l’homme ; et
  3. Les responsables gouvernementaux américains, européens et autres veillent à ce que les fonds philanthropiques destinés aux organisations de la société civile en Palestine leur parviennent sans interférence du gouvernement ou des institutions financières israéliennes.

En tant que donateurs mondiaux pour les droits de l’homme et la démocratie, cette tentative de “geler” notre financement et notre solidarité ne marchera pas. Nous sommes aux côtés des organisations de la société civile et des défenseurs des droits de l’homme palestiniens. Nous affirmons notre droit à la liberté d’expression et à apporter un soutien financier aux organisations qui défendent les droits de l’homme, la dignité et le bien-être du peuple palestinien.

Sincèrement,

Organisations philanthropiques

Access Strategies Fund

Agroecology Fund

Alison Gottlieb Donor Advised Fund

American Friends Service Committee

ARC of Justice

Asfari Foundation

Bizilur

Bonus Fund

CarEth Foundation

Caribou Fund

Chinook Fund

Chorus Foundation

CIVICUS: World Alliance for Citizen Participation

Claire Barker Charitable Fund

Coco Canary Consulting, LLC

Collective Future Fund

Colombe Peace Foundation

Common Counsel Foundation

CS Fund

Cultures of Resistance

Donkeysaddle Projects

EDGE Funders Alliance

Eleanor Friedman Fund

Farbman Family Foundation

Fomite Press

Fondation Danielle Mitterrand

Fondo Semillas

Foundation for Middle East Peace

Front Line Defenders

Fund for Democratic Communities

Fund for Global Human Rights

Fundación Mundubat

GaiaWise

Global Focus

Global Fund for Women

Grassroots International

Guerrilla Foundation

Human Rights Funders Network

JG3: Jacobs Grounded Guided Giving

JVP Health Advisory Council

Karibu Foundation

Kolibri Foundation

Lannan Foundation

MADRE

Medico International E.V.

Middle East Children’s Alliance

North Star Fund

Palitan Consulting

Peace Development Fund

PRBB Foundation

Prospera International Network of Women’s Funds

Radical Imagination Family Foundation

Ralph E. Ogden Foundation

Rawa Fund

RESIST, Inc.

Resource Generation

Right Livelihood

Rumpelstiltskin

Sagner Family Foundation

Samuel Rubin Foundation

Seymour and Sylvia Rothchild Family Foundation

Social Justice Fund NW

Solidaire Action Fund

Sparkplug Foundation

St. John Chrysostom Justice and Peace Committee

Terra Fund

Unitarian Universalist Service Committee

Urgent Action Fund for Women’s Human Rights

WESPAC Foundation, Inc.

Women’s Fund in Georgia

 

Philanthropes/donateurs individuels

Adam Ratner

Alan Meyers, MD

Alice Rothchild, MD

Alison Gottlieb

Angelica S. Harter

Amy Alpert

Becky Silverstein

Bonnie Shepard

Bram Wispelwey, MD

Charles A. Walsh

Claire Isaacson Barker

Clare Woodcraft

Cynda Collins Arsenault

Cynthia Jama Baxter

Dan Connell

Dan Klein

Danni Marilyn West

Davian Gagne, MSW

David Holmstrom

David S. Klein

Debbie Hird

Dorothy Burlage

Elena Bird

Elsa Auerbach

Emma Klein

Eric Sargent

Erik Ortiz

Gordon Fellman

Hayat Imam

Hendrix Berry

iara lee

James Marc Leas

Jessie Bluedorn

Jo Miller-Gamble

Kacy Lane

Katherine Yih

Leslie Zebrowitz

Marjorie Suisman

Maxine Fookson

Michael Gast

Miriam Cohen

Molly O’Connor

Nancy Gold

Nancy Holmstrom

Naomi Sobel

Nikhil Aziz

Nora Burridge

Pam Rogers

Rachel Rubin, MD, MPH

Ravi Khanna

Rebeca Sandoval

Sara Sargent

Sasha Klein

Scott Handleman

Sean Poynter

Sima Kahn, MD

Simon J. Klein

Trude Bennett, DrPH

Victor Wallis

Article original en anglais sur Funders4Palestine / Traduction MR