Point de non-retour – Prendre les armes en Palestine ou choisir une résistance pacifique – Documentaire de Raül Gallego Abellán

« La plupart des jeunes du camp n’a jamais vu la mer. Ils voient des gens se faire tuer mais ils ne voient jamais la mer. »

Capture d’écran du documentaire ci-dessous.

Une nouvelle génération de groupes armés est apparue en Palestine. Ils sont jeunes, hors du contrôle de l’Autorité palestinienne. Les forces israéliennes les recherchent, les capturent et dans la plupart des cas, les tuent. Nous avons eu un accès exclusif au groupe le plus recherché et le plus actif : le Jihad islamique palestinien dans le camp de réfugiés de Jénine.

Camp de réfugiés de Jénine, Brigades al-Quds du Jihad islamique palestinien – Centre de commandement

Nous vivons dans une prison, nous n’avons rien vu au cours de notre vie et nous ne pouvons pas circuler librement / Nous ne pouvons pas sortir du camp. / Ils vont et viennent et nous tuent. / Nous avons une unité de repérage en alerte 24h/24, 7j/7. / Pour repérer le moindre mouvement et être prêts quoiqu’il advienne. / Ces lunettes sont celles de mon ami Farouk Salameh. Paix à son âme. / Un martyr qui a été assassiné dans le camp. / Je porte les lunettes de la liberté. / Je me souviens de l’invasion (2002), j’étais un gamin. / Notre maison a été démolie, celle de notre voisin aussi. / J’ai quitté l’école quand j’avais 12 ou 13 ans. / J’ai travaillé quelques temps puis j’ai fini par arrêter. Ça ne marchait pas. / J’ai été emprisonné pendant 1 an et demi. J’avais 20 ans à ma sortie. / Je suis resté en liberté pendant 2 ans, puis j’ai à nouveau été emprisonné. / C’est une blessure des forces d’occupation. / Je participais au combat et un sniper m’a tiré dessus. Il m’a tiré dans le cou.

  • Comment ça s’est passé ?

La balle est entrée ici et est sortie derrière mon épaule. / Lorsqu’il y a la moindre alerte dans le camp, / ou lorsqu’on voit des drones, / nous installons les barrières et bouclons les entrées du camp. / Nous sommes prêts à affronter l’occupation et à la combattre. / Contrairement à nous, l’occupation a une technologie de pointe. Comment dire ? / Par exemple il ont des avions à réaction et des véhicules blindés. / L’Iran fournit au Jihad islamique formation, expertise et argent, mais la plupart des armes du groupe sont passées en contrebande localement depuis Israël. / Un fusil automatique peut coûter de 10.000 à 12.000 US$ environ et 3 US$ la balle. / Sans l’occupation, j’aurais travaillé. Je serais peut-être marié et j’aurais des enfants. / Je m’occuperais de mes parents. / Depuis l’enfance, nous voyons des armes et des hommes qui tirent sur les soldats. / Maintenant nous sommes plus âgés et c’est nous qui portons les armes, qui tirons sur l’armée et résistons, pour l’amour de Dieu.

Naplouse, Cisjordanie

Le quartier Al-Yasmineh est célèbre pour le parfum du jasmin, mais cette année / dans chaque coin et ruelle nous sentons l’odeur d’un martyr. / Littéralement dans chaque coin, quelqu’un est tombé en martyr. Paix à leurs âmes.

Farah Qayeem, sœur d’un militant tué

Ce dont je me souviens le plus chez Hamdi, c’est sa gentillesse, il était très affectueux.

  • Bonjour, mon oncle
  • Bonjour, bonjour
  • Que l’âme de ton frère repose en paix
  • Amen
  • Que Dieu ait pitié de son âme
  • Amen
  • Puisse-t-il reposer au paradis
  • Amen

Nous ne savions pas que Hamdi était impliqué. / Nous l’avons découvert après son martyre. / Nous avons entendu qu’il y avait des combats à Deir al-Hatab ,et j’ai dit, quel malheur, / que Dieu protège les gars, puis j’ai découvert que mon frère était parmi eux.

Camp de réfugiés de Jénine, Cisjordanie

Ils passent par Jabreyat pour venir au camp. / Il y a des trous de balle dans les vitres ! / Maintenant l’armée d’occupation envahit le camp. / Alors les gars se préparent très vite à affronter l’occupation.

On y va !

Faites attention !

Pas les visages, ok ?

Dans le camp de réfugiés de énine, nous avons le Hamas, le Fatah, le Jihad islamique, les Brigades d’Al-Aqsa… / Oui, ce sont toutes des factions différentes mais pendant le combat, nous ne faisons qu’un. / Nous avons été étonnés qu’ils viennent tous : l’armée, les forces spéciales, tout. Ils sont tous venus ici. / Ils ont capturé mon frère, Hariri,

Réunion des mères des martyrs de Naplouse et de Jénine

Bonjour, aujourd’hui nous sommes chez la mère d’Oday al-Azeezy. / Aujourd’hui, nous ne rendons pas seulement visite à une mère de martyr. / Que faisons-nous aujourd’hui, Farah ?

– Aujourd’hui, nous nous sommes réunies avec 45 mères de martyrs pour partager leur douleur. / Venez avec nous pour entendre leurs histoires. On y va.

Mon ami Wala et moi avons commencé à leur rendre visite, pour s’asseoir, parler, les consoler. / Avant, nous parlions de leurs fils, maintenant nous parlons de Hamdi et de leurs fils. / Maintenant nous partageons leur chagrin.

Nous pensions qu’ils [les soldats israéliens] ne venaient que la nuit. / Ils adoptent la méthode d’assassinat. C’est maintenant la tendance. / Ils ne viennent pas pour arrêter, je veux dire qu’ils peuvent arrêter, ou blesser légèrement puis arrêter, / mais non, maintenant ils ne viennent que pour assassiner.

Funérailles de Hassan Qatnani et de Moaz al-Masri, tués par les troupes israéliennes, tous deux accusés d’avoir tiré sur le véhicule d’une femme colon (48 ans) faisant trois victimes, elle et ses filles (20 et 16 ans) dans la vallée du Jourdain.

Gâcher nos vies et utiliser des M-16 / et des fusils. / Je pense que c’est très mal. / Nous l’avons fait auparavant. / Ca ne marche pas.

Bethléem, Artas

Beaucoup de ces gars ressentent exactement la même chose que moi il y a 20 ans. / J’avais 19 ans, pendant la deuxième Intifada / quand j’ai vu une petite fille / elle n’avait que 7 mois / tuée par les Israéliens,

Mahmoud Jabr, ex-combattant des Brigades des Martyrs d’Al-Aqsa

je ne pouvais pas oublier cette image. / Vous savez, ça m’a choqué. / Ca m’a poussé à faire quelque chose, / j’ai trouvé ma voie et je suis devenu un combattant. / Ils m’ont accusé d’être un terroriste / combattant et tirant sur leurs soldats. / Quelle ironie ! / Ils occupent mon pays, ont tué mon ami, / ils construisent des colonies, / ils ont tout détruit / et puis ils arrivent et disent que je travaille contre un « Etat démocratique » !

Ils m’ont pris en 2006 / et j’ai recouvré ma liberté / quand ils m’ont libéré en 2018. / Ma mère a fait énormément / pour moi. 12 ans. / Ce n’est pas facile de voir sa mère / et sa famille souffrir à cause de vos choix. / Pour moi maintenant, après toutes ces années / la chose la plus importante maintenant est / cette terre.

Guy Hirschfeld, “Regarder l’occupation en face”

-J’ai servi dans l’armée. / Aujourd’hui, si je devais aller à l’armée, / je refuserai.

Le gouvernement Netanyahou, allié à l’extrême droite, et ses réformes judiciaires, ont déclenché des protestations et des divisions internes sans précédent dans le pays.

– La situation aujourd’hui en Israël est que nous avons le gouvernement radical le plus extrémiste avec des groupes qui seraient probablement considérés comme des néo-nazis en Europe.

– La majorité nous respecte maintenant. / Il y a 16 semaines, / ils étaient tous contre nous. / Nous ne pouvons pas être une démocratie / seulement pour les juifs.

Libérez, Libérez la Palestine

– Et ce gars là, juste à droite, , / il dit qu’il est contre nous

Martin Goldberg, “Regarder l’occupation en face”

parce qu’il dit que nous faisons peur / à ce qu’il appelle la droite gentille. / Mais la droite gentille c’est pareil, / c’est les mêmes gens qui se mobilisent pour l’occupation / et pour toutes les colonies illégales et les trucs comme ça. / Et oui, il est temps que quelqu’un se tienne en face d’eux / et leur dise, / « les gars, vous avez tort, / et vous faites partie du problème. »

-Vous ne pouvez pas tout avoir en ce moment.

-Mais quand est-ce le bon moment / pour parler de l’occupation ?

– Quand vous n’avez plus le couteau sous la gorge.

– Depuis 1967, pourtant, vous n’avez pas trouvé / le moment d’en parler.

-Mais maintenant nous sommes au plus bas.

-Depuis 1967, vous avez toujours trouvé une excuse / pour dire que ce n’est pas le bon moment / ou pas le bon endroit.

-Maintenant, nous y sommes.

-Pas le bon…

-Nous avons essayé

-Il y a toujours une excuse pour ne pas le faire.

-Nous avons essayé

-Des conneries, nous n’avons rien essayé du tout!

Nous n’avons jamais essayé.

Pancarte : FIN DE LA SUPREMATIE JUIVE

FIN DE L’APARTHEID

-Il n’y a pas de gauche en Israël. / Ils essaient tout le temps d’être sympa avec / le centre, avec la droite modérée, / et ça nous affaiblit. / Les radicaux extrémistes de droite / en ont profité / pour faire ce qu’ils voulaient.

-C’est si agréable de voir un autre villageois / revenir sur sa terre, / et regarde ! / D’ailleurs il replante des concombres. / Wala ! C’est si agréable / Ca fait du bien.

-Ce qui est dur ici, c’est que les restrictions de l’occupation israélienne sur les agriculteurs / ont poussé la plupart des propriétaires terriens à quitter leurs terres, comme je l’ai montré, / quitter leurs terres pour aller travailler à l’intérieur de la ligne verte / et le pire de tout, c’est qu’ils travaillent à la construction de colonies. / A partir de là, nous avons eu l’idée de soutenir les agriculteurs qui ont quitté leurs terres / pour qu’ils arrêtent de travailler pour l’occupation et qu’ils reviennent travailler leurs propres terres / et nous leur fournissons des graines de très bonne qualité à des prix très convenables pour les soutenir.

Vallée du Jourdain, Cisjordanie

-Il y a des avant-postes juifs et les terroristes qui arrivent de là / essaient de pousser les bergers à quitter ces zones.

Images de Guy Hirschfeld

-Ils masquent leur visage pour que nous ne puissions pas les reconnaître. / C’est un problème, ils tuent, ils volent et jettent toutes leurs ordures. / Ils sont comme une mafia, ils arrivent avec trois voitures. / Absolument comme une mafia.

-C’est quand la dernière fois qu’ils sont venus ?

-Tous les jours ! Ils viennent tous les jours ! / C’est le début du Centre / dans la Vallée du Jourdain, pour les activistes, les Israéliens, les Palestiniens, les internationaux.

-Un cas intéressant, à « Regarder l’occupation en face », / est Doron Meinrath. / Il a occupé un poste élevé / dans l’armée pendant 25 ans / et il nous a rejoint. / Tu sais, il était, / en hébreu, nous appelons ça « Meinlach ha’aretz » / comme le meilleur du meilleur. / Et tout d’un coup, il a commencé / à parler comme nous. / Tout d’un coup il ne croit plus en l’armée et…

Doron Meinrath, colonel de l’armée israélienne à la retraite

– Cette tente n’est pas belle. / Peut-être en avez-vous déjà vu de / plus belles dans votre vie. / Mais cette tente est très importante / parce que nous allons nous asseoir ici / tous les jours et toutes les nuits / contre les colonies et contre l’armée.

-Voyons ce qu’il y aura ici dans un an.

Retour dans le camp de Jénine

-Nous publions une vidéo sur You Tube, Instagram, Facebook et toute autre plateforme, / et nous avons beaucoup d’interactions. / Ca nous donne le moral parce que les gens nous aiment. / Et nous en profitons. / Les gens prient sans arrêt pour nous.

-Ils n’ont pas assez d’expérience. / Combattre des soldats professionnelsn’est pas facile pour des gamins.

-Prends une photo !

-Nous nous entraînons beaucoup. / Il n’y a pas que les soldats qui s’entraînent, nous nous entraînons nous aussi. / Si je disparais, 10 ou 20 gars prendront ma place.

Les Forces de défense israéliennes ont refusé notre demande d’interviewer un représentant ou un porte-parole

Et l’Autorité palestinienne a répondu qu’elle n’était pas disponible pour un entretien.

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“Point of No Return” a eu un accès exclusif aux militants les plus recherchés par les forces de sécurité forces d’occupation, ndt)  d’Israël : les brigades Al Quds du Jihad islamique du camp de réfugiés de Jénine.

Une nouvelle génération de Palestiniens, très jeunes et inexpérimentés, affronte les forces de sécurité implacables d’Israël. Quelle est la réalité de ces jeunes et pourquoi ont-ils décidé de prendre les armes dans un combat aussi inégal contre une armée qui les recherche, les capture et, dans la plupart des cas, les élimine ?

Mais parmi les Palestiniens et les Israéliens, il y a encore des gens qui cherchent aussi une alternative aux armes, malgré la nouvelle spirale de violence et le gouvernement le plus à droite de l’histoire d’Israël.

Sommes-nous à un point de non-retour dans le “conflit” israélo-palestinien ?

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Un documentaire de Raül Gallego Abellán

CCMA executive production: Adrià Serra Mayoral, Medir Plandolit Casals i Anna Lòpez Gonzàlez CCMA producer: Montserrat Rovira Gil

Production Israel Palestine: Latifeh Abdellatif

Fixer: Mutasem Saqf Elhait

Image: Raül Gallego Abellán

Publisher: Martí Genís Bardolet

Post production: Pospotime

Linguists: Ignasi Oliver i Yannick Garcia Porres

A CCMA production in collaboration with Raül Gallego Abellán

Special thanks: Agron, Laura, Mahmoud, Wajdi, Gahyan, Oxigen Group Artas, Alard Nursery i Looking the Occupation in the Eye

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Traduction des sous-titres anglais MR

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