Le « déclin sans précédent » des droits des enfants palestiniens

Nadeen Alshaer, Jerusalem24. Le 5 avril marque la Journée de l’enfant palestinien et, selon les statistiques recueillies par les instituts pour enfants, la situation des droits de l’enfant dans les territoires palestiniens connaît une forte détérioration.

Defence for Children International-Palestine (DCIP) déclare que « l’occupation israélienne continue de violer systématiquement les droits fondamentaux des enfants palestiniens » dans son rapport publié avant la Journée de l’enfant palestinien.

Ayed Abu Eqtaish, directeur du programme de responsabilisation au DCIP, explique à Jérusalem24 que le rapport met en lumière la réalité des droits des enfants palestiniens dans les territoires palestiniens grâce à la documentation recueillie sur le terrain.

« Nous avons constaté que tous les droits des enfants palestiniens sont violés par les forces d’occupation israéliennes », affirme Abu Eqtaish. « Nous pensons que les droits des enfants sont interconnectés, de sorte que toute violation de l’un de ces droits affecte nécessairement la jouissance des autres droits des enfants palestiniens. »

Le rapport identifie les violations dans plusieurs domaines principaux :

1. Procès militaires, détention arbitraire et torture

Selon la documentation du DCIP, presque tous les enfants palestiniens arrêtés et poursuivis par l’armée israélienne ont été exposés à différents types de mauvais traitements et de torture. Abu Eqtaish dit que les enfants subissent divers types de mauvais traitements et d’abus, généralement sous la forme de violences physiques ou de pressions psychologiques, en particulier lorsqu’ils subissent des interrogatoires militaires.

Mais Abu Eqtaish pense que « le [pire] mauvais traitement qu’ils subissent est l’isolement cellulaire ».

Ahmad Manasra, en isolement cellulaire depuis novembre 2021 malgré les graves troubles psychologiques consécutifs.

L’année dernière, le DCIP a documenté 24 cas d’enfants palestiniens placés à l’isolement, dans des cellules de 1m² x 2, sans aucune interaction correcte avec d’autres êtres humains. « L’objectif est de leur extorquer des aveux qui seront utilisés dans les rapports militaires comme preuves principales contre les enfants », explique Abu Eqtaish.

Au cours de l’année dernière, dit-il, environ les trois quarts des enfants palestiniens ont été exposés à des violences physiques lors de leur arrestation, de leur transport et de leur interrogatoire par les forces israéliennes.

« Le système judiciaire israélien est un système arbitraire », déclare Abu Eqtaish. « Presque tous les enfants palestiniens qui comparaissent devant un système judiciaire militaire seront inculpés parce qu’il est presque impossible pour les avocats de prouver que les preuves leur ont été extorquées, puisque les enfants sont interrogés sans tuteur ni représentant.

Chaque année, les forces israéliennes détiennent entre 500 et 700 enfants. Au 31 mars, 151 enfants palestiniens sont détenus par les autorités israéliennes, la plupart dans les prisons de Damon et d’Ofer. 19 de ces enfants ont moins de 16 ans, selon la documentation du DCIP.

Pour aggraver le traumatisme, des centaines d’enfants palestiniens sont arrêtés chaque année par l’armée ou la police israélienneen pleine nuit sans aucune alerte, une pratique qui cause « un traumatisme à long terme pour toute la famille », selon la directrice de HaMoked, Jessica Montell.

L’année 2022 a également été marquée par une augmentation du nombre d’enfants placés sous ordonnance de détention arbitraire sans inculpation ni procès (détention dite administrative). Dix enfants sont actuellement placés en détention arbitraire, dont trois enfants qui ont reçu de nouvelles ordonnances le jour où leurs ordonnances initiales ont pris fin.

« Selon la convention relative aux droits de l’enfant, l’arrestation d’enfants, pour une période courte, doit être un dernier recours », nous rappelle Abu Eqtaish. « Il devrait également y avoir des alternatives à l’arrestation. »

2. Démolition de maisons

Entre le 1er janvier et le 30 mars, 194 enfants ont été déplacés à travers la Cisjordanie occupée, y compris Jérusalem-Est occupée, en raison de la démolition de leurs maisons par les autorités israéliennes.

Abu Eqtaish décrit ces démolitions comme des « démolitions punitives » qui équivalent à une « punition collective » sur les enfants et leurs familles.

Les ONG ont également constaté que les enfants palestiniens confrontés aux démolitions de maison ont des problèmes de santé mentale à vie.

3. Impunité pour les auteurs de violences contre les enfants

17 enfants palestiniens ont été abattus par des tirs israéliens en Cisjordanie occupée depuis le début de l’année, la plupart d’entre eux ciblés dans le haut du corps – ce qui dénote une intention de tirer pour tuer, a déclaré le ministère palestinien de la Santé.

« La politique d’impunité et d’absence de responsabilisation dont bénéficient les soldats de l’occupation israélienne, et leur connaissance préalable qu’ils ne seront pas tenus responsables de leurs actes, quels qu’ils soient, les encouragent à poursuivre leurs violations des droits et l’escalade des enfants palestiniens », déclare Abou Eqtaish.

« Surtout sous l’actuel gouvernement fasciste israélien », ajoute-t-il, « dont les ministres autorisent les médias à soutenir les colons et les soldats de l’occupation dans leurs crimes contre les civils palestiniens, y compris les enfants ».

4. Pas d’accès garanti à l’éducation

Le DCIP note que les autorités, l’armée et les colons israéliens ne sont pas les seuls pourvoyeurs de violations des droits des enfants palestiniens.

Le rapport mentionne qu’au sein de l’Autorité palestinienne, la condition des droits de l’enfant palestinien « a connu un déclin notable » – notamment dans l’éducation, selon DCIP, car les enfants ont « perdu leur droit à l’éducation » en raison d’une grève d’une journée que mènent les enseignants.

« Cette affaire rejaillit sur les droits des enfants », déclare Abu Eqtaish. « Un grand nombre d’enfants sont entrés sur le marché du travail, ce qui constitue une menace pour leur droit à la vie et augmente les risques sociaux dus à leur manque d’éducation. »

Article original en anglais publié le 6 avril 2023 sur jerusalem24 / Traduction MR

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