Partager la publication "La violence militaire s’intensifie, comme la brutalité des colons"
Nadeen Alshaer, 27 octobre 2022. Les chiffres enregistrés montrent que 2022 a connu l’une des vagues d’attaques les plus meurtrières dans les territoires palestiniens, avec 183 Palestiniens tués depuis le début de l’année, et des attaques violentes de colons israéliens contre des Palestiniens en Cisjordanie qui augmentent en fréquence et en intensité.
Des colons israéliens ont également tué trois Palestiniens en Cisjordanie cette année, dont un jeune homme de 17 ans. Aucun n’a été poursuivi.
Selon le coordinateur humanitaire des Nations unies, 2022 a été l’année la plus meurtrière en Cisjordanie depuis 2006.
Pendant la saison de la cueillette des olives en particulier, qui a commencé il y a deux semaines, il y a toujours une forte recrudescence de la violence des colons. Selon Haaretz, la plupart des attaques récentes ont eu lieu dans le nord de la Cisjordanie, autour de Huwara, le village palestinien qui se trouve sur la route reliant les parties nord et sud de la Cisjordanie.
Mutaa, le centre d’information sur la Palestine, a signalé 106 attaques de colons israéliens contre des Palestiniens au cours du mois de septembre.
Le 21 octobre, Haaretz a rapporté que plus de 100 actes violents avaient été commis par des colons israéliens en seulement 10 jours.
Les attaques des colons, appelées « prix à payer », consisent en jets de pierres, agressions et affrontements avec des Palestiniens, bris de vitres de véhicules, incendies de voitures et d’oliviers, tirs à balles réelles sur des Palestiniens, attaques contre les maisons des résidents, perturbations dans le travail des équipes médicales et agressions physiques.
Le Croissant-Rouge palestinien (PRC) a confirmé à Jérusalem24 que ses équipes ont été victimes de 23 violations commises par des soldats et des colons israéliens au cours du mois d’octobre.
La PRC a indiqué que ses équipes ont été harcelées et attaquées lors de trois incidents différents et que les ambulances ont été attaquées lors de cinq autres incidents. Les équipes médicales ont été empêchées de fournir des soins médicaux dans huit incidents, et dans sept autres, des colons et des soldats israéliens ont interféré avec le travail des équipes médicales.
Fawaz Al-Bitar, un ambulancier, a été arrêté le 19 octobre, après avoir été détenu avec une équipe médicale. Un tribunal israélien a renouvelé, aujourd’hui jeudi, sa détention pour sept jours.
Quatre attaques en 24 heures
Lors d’un épisode particulièrement tendu il y a deux semaines, Huwara a subi quatre attaques en 24 heures.
Le jeudi 13 octobre, des colons ont jeté des pierres sur des voitures et mis le feu à des oliviers, avant qu’un groupe de soldats israéliens n’arrive sur les lieux.
Abdullah Odeh, propriétaire d’une aire de jeux à Huwara qui se trouvait directement sur la trajectoire de la première attaque, a déclaré à Middle East Eye dans une interview le 15 octobre que les colons sont restés une vingtaine de minutes, et qu’ils ont réussi à mettre le feu à des dizaines d’oliviers et à détruire les fenêtres et la carrosserie de trois véhicules.
« Les colons battaient en retraite, mais lorsqu’ils ont vu les soldats, ils sont revenus en force et ont commencé à se rapprocher, brisant tout sur leur passage », a déclaré Odeh à MEE. « Les soldats ne les ont pas repoussés. Au contraire, ils ont commencé à nous attaquer et à tirer dans notre direction. »
Scènes d’attaques de colons contre des magasins à Hawara, au sud de Naplouse, et des soldats de l’occupation attaquant les Palestiniens qui tentaient de les affronter.
مشاهد من هجوم مستوطنين على محلات تجارية في حوارة جنوب نابلس، وجنود الاحتلال يعتدون على الفلسطينيين الذين حاولوا التصدي لهم. pic.twitter.com/3bMPtjNoDZ
— شبكة قدس الإخبارية (@qudsn) October 13, 2022
Au moment même où le groupe de colons attaquait l’aire de loisirs d’Odeh et les maisons environnantes, un autre groupe de colons armés et masqués lançait une attaque contre des maisons et des commerces sur la route principale de Huwara, selon les témoignages recueillis par MEE.
Cette nuit-là, à 3 heures du matin, les colons sont revenus et ont vandalisé d’autres magasins de la région et blessé un agent de sécurité.
Plus tard dans la journée de vendredi, vers 1h00 du matin, alors que les habitants étaient en train de prier à la mosquée, les colons sont revenus pour la quatrième fois et ont vandalisé d’autres maisons et commerces.
« Depuis que les attaques ont commencé jeudi, les colons ont brûlé entre 20 et 30 oliveraies et vandalisé plus de 30 magasins et maisons. Les forces israéliennes ont arrêté au moins huit Palestiniens de Huwara et en ont blessé plusieurs autres lors de confrontations », a déclaré à MEE Mohammad Khalaf, porte-parole de la municipalité de Huwara.
En sécurité nulle part
Si Huwara s’est retrouvée au centre d’attaques récentes, les communautés palestiniennes de Cisjordanie font régulièrement l’objet de violences de la part des colons, presque toujours sous l’œil de l’armée israélienne qui n’intervient que pour soutenir les colons, dans des incidents de plus en plus brutaux et arrogants.
Le 25 octobre, des colons israéliens ont attaqué des Palestiniens à Turmus Aya, une petite ville prospère au nord de Ramallah, alors qu’ils cueillaient des olives. Les colons ont brûlé une voiture appartenant au Comité de résistance au mur et aux colonies et une autre appartenant à un résident, dans une attaque qui a été minutieusement documentée sur les réseaux sociaux.
Maintenant, à Turmus Aya, des colons israéliens attaquent des Palestiniens lors d’une récolte d’olives, les colons attaquent des voitures et jettent des pierres alors que des soldats israéliens sont présents sur les lieux
Now in Turmus Aya Israeli settlers attack Palestinians during an olive harvest, the settlers attack cars and throw stones as Israeli soldiers are present at the scene pic.twitter.com/WRKq17RY7I
— Oren Ziv (@OrenZiv_) October 25, 2022
Le 24 octobre, des colons ont attaqué des maisons et des véhicules de citoyens dans la ville de Tuqu’, au sud-est de Bethléem, en Cisjordanie occupée.
Des sources locales ont rapporté qu’un groupe de colons a lancé des pierres sur plusieurs maisons et véhicules appartenant à la famille Al-Amour, brisant leurs fenêtres.
Impunité sélective
Le 20 octobre, un groupe de colons israéliens a lancé des pierres sur des véhicules palestiniens qui passaient à Huwara, avant d’attaquer également des soldats israéliens déployés dans la zone.
L’armée israélienne a déclaré que des colons avaient aspergé de gaz poivré deux autres soldats à la jonction de Tafuah (Tapuach), également en Cisjordanie.
Il n’est pas rare que des colons attaquent des soldats israéliens. Cependant, enregistrer deux attaques en un jour est inhabituel.
L’un des agresseurs, un soldat israélien qui vit dans une colonie illégale près de la ville de Naplouse, a été arrêté par la suite.
Selon un communiqué publié par l’armée, les soldats israéliens ont été « violemment attaqués, notamment au gaz poivré, par un certain nombre de colons », ce qui a blessé le commandant de l’unité et un autre soldat, selon Haaretz.
L’armée israélienne a rapidement publié une condamnation. « Le comportement des colons, qui sont protégés par eux [les soldats], est inacceptable et doit être vigoureusement éradiqué. »
Le Premier ministre israélien Yair Lapid a qualifié les assaillants de « dangereux criminels » qui « doivent être punis sans hésitation. Ils mettent en danger la vie de nos soldats et portent atteinte à l’État d’Israël. »
Il s’agissait d’un rare exemple de condamnation immédiate et sévère suivie d’une action judiciaire contre des colons israéliens auteurs d’attaques en Cisjordanie.
La veille, le 19 octobre, une militante de gauche israélienne de 70 ans avait été attaquée par des colons israéliens dans le village de Kisan, à l’est de Bethléem, alors qu’elle aidait des Palestiniens à récolter des olives.
פעילי זכויות אדם שבאו מישראל הותקפו באלות ובאבנים ע"י מתנחלים סמוך להתנחלות מעלה עמוס.
כך נראה הכיבוש. pic.twitter.com/eDPTOA5Z9h— Mossi Raz | מוסי רז | موسي راز 🟣 (@mossi_raz) October 19, 2022
Hagar Gefan a été hospitalisée et souffre d’une main et de côtes cassées, d’un poumon perforé et a dû recevoir des points de suture à la tête.
La police israélienne a informé Hagar Gefan qu’elle voulait l’interroger, avant de lui dire qu’elle souhaitait obtenir son témoignage sur l’incident, rapporte Haaretz.
Deux autres militants de gauche qui ont été attaqués par des colons ce jour-là ont été convoqués pour être interrogés par la police israélienne mercredi.
Yesh Din, une ONG israélienne qui surveille les activités des colons et des colonies en Cisjordanie occupée, rapporte qu’entre 2005 et 2021, « environ 3 % des dossiers d’enquête (52 dossiers) ouverts à la suite d’infractions à motivation idéologique commises par des colons israéliens contre des Palestiniens en Cisjordanie ont abouti à des condamnations. »
Article original en anglais sur Jerusalem24 / Traduction MR
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