Partager la publication "« Neutralité » et aide humanitaire pour les réfugiés palestiniens"
Ramona Wadi, 20 juillet 2021. Le président américain Joe Biden a transféré 135,8 millions de dollars à l’Office de secours et de travaux des Nations unies (UNRWA), suite à la signature du Cadre de coopération 2021-2022 et avec des conditions supplémentaires pour l’engagement de l’agence à la « neutralité ».
« La signature du cadre de coopération entre les États-Unis et l’UNRWA et le soutien supplémentaire démontrent que nous avons à nouveau un partenaire permanent aux États-Unis qui comprend la nécessité de fournir une assistance essentielle à certains des réfugiés les plus vulnérables de la région », a déclaré le commissaire général de l’UNRWA, Philippe Lazzarini.
L’aide américaine à l’UNRWA a été accordée contre un engagement de l’agence à respecter des conditions telles que « communiquer toute infraction grave de la neutralité » aux États-Unis. « Comme toutes les agences des Nations unies, l’UNRWA et son personnel ne peuvent prendre parti dans des hostilités ou s’engager dans des controverses de nature politique, raciale, religieuse ou idéologique », peut-on lire dans l’accord.
L’UNRWA a été interpellée par Israël à plusieurs reprises, accusée de permettre l’incitation au terrorisme par le biais des manuels scolaires de l’Autorité palestinienne. Israël a critiqué la reprise du financement de l’UNRWA au début du mois d’avril, notamment l’ambassadeur israélien aux États-Unis et aux Nations unies, Gilad Erdan, qui a décrit l’UNRWA comme utilisant « une définition déformée de ce qu’est un “réfugié” ».
Entre les injonctions américaines et les contestations israéliennes, les réfugiés palestiniens sont pris dans le collimateur de l’aide humanitaire. Alors que le travail de l’UNRWA est sans aucun doute nécessaire, la condition de neutralité aligne davantage l’agence sur la politisation de l’aide humanitaire par la communauté internationale plutôt que de créer des opportunités pour les Palestiniens de poursuivre leur indépendance et leur libération éventuelle.
Les États-Unis sont-ils vraiment un partenaire qui comprend la nécessité de subvenir aux besoins des réfugiés palestiniens, comme l’a déclaré Lazzarini, ou jouent-ils une fois de plus un rôle dans le maintien à flot de l’UNRWA tout en veillant à ce que les Palestiniens n’avancent jamais vers le rapatriement et la décolonisation ?
Si la neutralité est censée étouffer la décolonisation, il va de soi que l’engagement de l’UNRWA à la neutralité soutient la colonisation de la Palestine par Israël. L’aide humanitaire doit être reconsidérée en décrivant le processus pour ce qu’il est – un cadre qui prive les Palestiniens de leurs droits politiques en échange de leur aide à survivre aux indignités du déplacement forcé.
Quel que soit le montant de l’aide promise à l’UNRWA, les Palestiniens ne seront pas dédommagés pour la perte qu’Israël a infligée par son appropriation coloniale des terres. En outre, si l’UNRWA accepte la définition américano-israélienne de la neutralité, elle devra également remettre en question son propre rôle dans l’aide aux réfugiés palestiniens.
La tragédie des réfugiés palestiniens ne s’est pas produite sans contexte. Le nettoyage ethnique sioniste du territoire palestinien – une action qui n’a rien à voir avec la neutralité et à laquelle l’ONU a consenti – doit faire partie du récit lorsque l’on parle du financement et des conditions de l’UNRWA ; ces dernières étant également imposées aux réfugiés palestiniens.
Pourquoi l’ONU et ses agences affiliées s’en tirent-elles en altérant le sens de la neutralité pour soutenir une entreprise coloniale qui crée quotidiennement de nouveaux réfugiés palestiniens ? Conditionner l’aide aux réfugiés palestiniens en fonction de la volonté de l’agence de promouvoir indirectement le récit qu’Israël souhaite – c’est-à-dire l’oubli des crimes du colonialisme de peuplement – garantit un monopole politique sur l’aide humanitaire. Un monopole qui piège les Palestiniens, plutôt que l’UNRWA, dans les complexités de la neutralité dictée par les alliés d’Israël.
Source : Middle East Monitor /Traduction : MR pour ISM
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