Partager la publication "Nouveau rapport d’Adalah : Plus de 30 nouvelles lois adoptées par la Knesset israélienne depuis le 7 octobre renforcent l’apartheid et la suprématie ethno-nationale juive"
Adalah, 24 novembre 2025. – Ces deux dernières années, la Knesset israélienne a adopté des dizaines de nouvelles lois dont l’effet cumulatif est de renforcer et d’aggraver le régime d’apartheid et de répression exercé par Israël sur tous les Palestiniens sous son contrôle, tant en Israël que dans les Territoires palestiniens occupés (TPO).

Bordeaux, manifestation Palestine du 15 novembre 2025 (source Comité Action Palestine)
Le nouveau rapport d’Adalah, intitulé : « Post-7 October: A New Wave of Anti-Palestinian Israeli Laws », [Après le 7 octobre : une nouvelle vague de lois israéliennes anti-palestiniennes] analyse les principales législations adoptées entre le 7 octobre 2023 et le 27 juillet 2025.
Ces lois couvrent de nombreux domaines, notamment la liberté d’expression, de manifestation et de pensée ; le droit à la citoyenneté et à la vie familiale ; l’égalité et les droits sociaux ; et les droits des détenus et des prisonniers. Ces nouvelles lois violent fondamentalement les droits humains des Palestiniens.
Bien que l’État ait légitimé ces nouvelles lois par le contexte politique de guerre, cette législation s’enracine dans la structure constitutionnelle d’Israël, fondée sur la suprématie ethno-nationale juive, ce qui, dans de nombreux cas, se traduit par des systèmes juridiques distincts pour les Israéliens juifs et les Palestiniens.
Ces lois reflètent et sont la manifestation de la Loi fondamentale de 2018 : État-nation du peuple juif ; comme l’a déclaré ce nouveau gouvernement dans ses principes directeurs, « le peuple juif a un droit exclusif et inaliénable sur toutes les zones de la Terre d’Israël ». Depuis le 7 octobre 2023, les autorités israéliennes ont instrumentalisé la guerre pour accélérer ces tendances et consolider la suprématie ethno-nationale juive à plus grande échelle. Ce nouveau rapport s’appuie sur la prise de position d’Adalah d’octobre 2024, qui examinait huit projets de loi, dont la plupart ont été ultérieurement promulgués. Les lois analysées dans ces rapports s’ajoutent à celles déjà recensées dans la base de données d’Adalah sur les lois discriminatoires, portant le total à une centaine de lois discriminatoires.
TENDANCES LÉGISLATIVES
Le rapport met en lumière plusieurs tendances législatives majeures. Premièrement, il documente de nouveaux amendements et l’utilisation accrue du cadre antiterroriste, qui, dans les faits, s’applique presque exclusivement aux citoyens palestiniens d’Israël et aux résidents palestiniens de Jérusalem-Est. Les définitions vagues d’« acte terroriste » et d’« organisation terroriste » dans la loi antiterroriste de 2016 et ses amendements ultérieurs sont devenues des outils essentiels pour réprimer la liberté d’expression des Palestiniens, en particulier depuis octobre 2023.
Une autre tendance consiste à orienter d’importantes ressources de l’État destinées aux réservistes israéliens juifs vers de nouveaux privilèges – impôts, aides sociales, accès à l’enseignement supérieur et à l’emploi – qui, de par leur nature, excluent les citoyens palestiniens d’Israël. Le rapport souligne également l’institutionnalisation de mesures d’urgence temporaires, régulièrement renouvelées ou pérennisées, permettant des violations généralisées des droits des détenus et des conditions de détention punitives pour les prisonniers palestiniens détenus par Israël.
CONSOLIDATION DE L’APARTHEID ET DES SYSTÈMES DE RÉPRESSION
Le rapport conclut que le Parlement israélien consolide un double régime juridique qui privilégie les Israéliens juifs tout en violant systématiquement les droits des Palestiniens. Cependant, contrairement aux systèmes historiques de suprématie raciale ou religieuse, tels que l’apartheid en Afrique du Sud ou les lois Jim Crow aux États-Unis, la plupart des lois israéliennes citées dans le rapport utilisent un langage juridique neutre. Leur historique législatif et leur application démontrent néanmoins le ciblage systématique des Palestiniens.
Ces lois criminalisent l’expression politique légitime, autorisent l’expulsion de familles palestiniennes, entravent le regroupement familial, permettent le licenciement d’enseignants palestiniens, suppriment les allocations sociales des familles palestiniennes dont les enfants mineurs sont reconnus coupables d’« atteintes à la sécurité » (notamment les jets de pierres), étendent les pouvoirs de détention et prolongent les détentions, restreignent l’accès à un avocat et ferment les médias indépendants. Elles violent à la fois les principes constitutionnels d’Israël et ses obligations en vertu des traités internationaux. Dans les territoires palestiniens occupés (TPO), ces mesures constituent une violation supplémentaire des obligations d’Israël au titre du droit international humanitaire.
Le rapport fait référence à l’avis consultatif de la Cour internationale de Justice (CIJ) de juillet 2024, qui conclut à l’illégalité de l’occupation prolongée d’Israël et à la violation des législations discriminatoires, lesquelles constituent une violation de l’interdiction de la ségrégation raciale et de l’apartheid, énoncée à l’article 3 de la Convention internationale sur l’élimination de toutes les formes de discrimination raciale (CERD). Il situe également ces nouvelles lois dans le contexte du génocide perpétré par Israël à Gaza, notamment les mesures restreignant les opérations de l’UNRWA et l’aide humanitaire, en violation directe des mesures conservatoires prononcées par la CIJ dans l’affaire Afrique du Sud c. Israël. D’autres lois, telles que la loi sur les combattants illégaux, permettent la détention arbitraire et les disparitions forcées, contribuant à la répression systémique des Palestiniens détenus en Israël depuis Gaza. La fermeture de médias comme Al-Jazeera vise à dissimuler les atrocités et à empêcher tout examen des violences d’État.
Adalah recense également d’autres projets de loi en attente – dont plusieurs sont actuellement examinés par la Knesset lors de sa session débutée fin octobre – qui éroderaient davantage la participation démocratique et l’égalité. Ces projets de loi élargiraient les motifs de disqualification des partis et candidats arabes à la Knesset, interdiraient l’emploi d’enseignants diplômés d’établissements d’enseignement palestiniens, permettraient de licencier le personnel universitaire en fonction de leurs opinions politiques, consolideraient l’annexion de la Cisjordanie par des modifications juridictionnelles et taxeraient notamment les financements des gouvernements étrangers aux ONG de défense des droits humains. Un autre projet de loi prévoit la peine de mort pour le meurtre d’un citoyen israélien commis par « racisme ou hostilité envers le public », « dans le but de nuire à l’État d’Israël et à la renaissance du peuple juif sur sa terre natale ».
Prises ensemble, ces initiatives législatives révèlent que le gouvernement et le Parlement israéliens continuent d’agir au mépris des engagements constitutionnels de l’État et du droit international, renforçant un régime d’apartheid et aggravant le déni des droits collectifs et individuels des Palestiniens.
Article original en anglais sur Adalah / Traduction MR