Abdulrahman Al-Shammari, 14 octobre 2025.– La guerre à Gaza s’est terminée – du moins le pense-t-on. Les avions ont cessé de voler, le grondement des canons s’est éteint, mais la ville ne dort pas. Des décombres, des gens émergent comme s’ils réveillaient la vie elle-même, que le monde croyait morte. Ils sont revenus, portant leur patrie dans leur cœur avant de porter leurs affaires.
Le monde a assisté à une scène inattendue : des hommes balayant la poussière des seuils, des femmes lavant des pierres avec l’eau de la mer de Gaza, et des enfants courant parmi les ruines à la recherche d’un ballon perdu – ou d’un livre pas encore brûlé. En quelques heures, la destruction s’est transformé en mouvement, la mort en travail et la ruine en volonté. C’est un miracle de l’humanité à tous égards, comme si Gaza elle-même sortait de la tombe en déclarant : « Me voici, à nouveau vivante.»
Plus de soixante mille personnes sont tombées en martyrs, plus de cent quarante mille ont été blessées et des milliers de maisons ont été détruites – pourtant, les survivants n’ont pas attendu ni aide ni excuses de ceux qui les ont trahis et abandonnés. Ils sont revenus aux vestiges de leurs maisons, reconstruisant à mains nues, comme si les pierres elles-mêmes embrassaient leurs paumes en disant : « Vous êtes les vraies pierres, par votre persévérance, pas moi. »
Ils ont semé l’espoir au milieu des décombres. Cette marche vers la vie étonne le monde, tout comme leur endurance face à une dévastation totale l’avait fait auparavant. Ce que d’autres perçoivent comme un « retour », les habitants de Gaza le voient comme une victoire, comme la reconquête de leurs droits volés.
En arabe, qui distingue si précisément les significations, fawz (victoire) et nasr (triomphe) ne sont pas synonymes.
Fawz signifie délivrance : sortir du feu l’âme intacte, même si le corps brûle, préserver sa dignité même si sa maison a disparu. Nasr signifie conquête : vaincre son ennemi et imposer sa volonté. Fawz sauve l’individu ; nasr conquiert l’ennemi. Et Gaza, grâce à l’équilibre du langage et de la justice, a gagné parce qu’elle a survécu, et a triomphé parce qu’elle a enduré.
Ils n’avaient ni avions, ni chars, ni ravitaillement, ni alliances – rien que la foi que la terre ne meurt pas tant que les cœurs y battent. De son sol, ils furent créés ; ils sont la terre, les décombres, les décombres – et pourtant, ils sont revenus comme des vagues déferlantes emportant le temps vers un avenir meilleur.
Gaza n’a brandi aucune arme plus puissante que la patience, aucune bannière plus haute que l’espoir.
Dieu Tout-Puissant a dit : « Combien un petit groupe a vaincu une armée puissante par la permission d’Allah !» Sa victoire est venue de Dieu seul, et non des armes des hommes. L’ennemi a perdu plus qu’il ne s’imaginait gagner. Il a perdu son image aux yeux du monde, tandis que le drapeau palestinien et la danse de Gaza se sont répandus à travers le monde, d’est en ouest.
Toute âme libre du monde est devenue « de Gaza », quelles que soient sa couleur, sa foi, sa confession ou sa langue. Gaza possède désormais un passeport qui n’est délivré par aucun gouvernement ni aucune autorité : son nom est Victoire. Il est porté par toute personne libre et noble, sans visa ni permission.
Gaza résonne désormais dans les rues des plus grandes villes du monde, dans ses stades et ses assemblées, et sur ses plateformes médiatiques les plus puissantes. L’ennemi a perdu le contrôle du récit, stupéfait par le changement de rôles et l’effondrement des équilibres qu’il avait consacré des décennies et des fortunes à maintenir. La barre n’est plus entre ses mains ; le navire est mené par les peuples libres du monde.
Telle est la victoire de Dieu, lorsqu’Il veut l’accorder, car à Lui appartiennent les soldats du ciel et de la terre. Quant à Gaza, elle a gagné, car elle est revenue, et son retour est une victoire.
Elle a gagné, car sa persévérance a contraint la politique à s’incliner, car son peuple a choisi la reconstruction plutôt que les pleurs, l’action plutôt que les lamentations, et l’espoir plutôt que le désespoir. Par Dieu, c’est véritablement une scène de victoire et de conquête manifeste. Qui a gagné ? Et qui a triomphé ? Par Dieu, ils ont gagné parce qu’ils n’ont pas capitulé, et ils ont triomphé parce qu’ils n’ont pas cédé, malgré la trahison du monde.
Ils ont été privés d’eau, et pourtant ils ne sont pas enfuis pas. Ils étaient censés être déplacés, et pourtant ils sont restés. Leurs maisons ont été incendiées, et pourtant ils n’ont pas cédé. Leur résistance a été assiégée, et pourtant elle n’a pas reculé. Ils ont été réduits au silence, et pourtant ils ne sont pas tus. Ils ne l’ont pas fait… et ne le feront pas – à jamais, avec persévérance et honneur.
Alors, vous demandez-vous encore : qui a gagné, et qui a triomphé ?
Article en anglais sur Middle East Monitor / Traduction MR Article original en arabe sur Al-Sharq.