Partager la publication "Témoignages de Gazaouis : La survie qui s’organise au jour le jour dans l’enfer de Gaza – partie 422 / 3 juin – Une catastrophe silencieuse menace les femmes enceintes"
Brigitte Challande, 4 juin 2025.- Texte après texte, Abu Amir décrit précisément toutes les conséquences dans tous les domaines de la tragédie continue à Gaza, blocus, génocide, massacres, famine, que faut il de plus pour exterminer un peuple ? Ce qui se passe à Gaza est un crime contre la vie elle même, nous dit Abu Amir le 3 juin.
« Le siège et la faim menacent les femmes enceintes à Gaza. Au cœur de la guerre qui ravage la bande de Gaza, sous un blocus étouffant qui perdure, des milliers de femmes enceintes se tiennent au bord du gouffre. Ce n’est pas seulement une tragédie humaine : c’est un drame continu qui menace la vie dans les entrailles, révélant un autre visage de la catastrophe que vivent les civils — en particulier les femmes, qui devraient, en période de grossesse, être en sécurité, bénéficier de soins et de soutien, et non lutter contre la faim, la peur et la maladie.
La faim frappe les utérus avant les corps
Selon les rapports du ministère de la Santé à Gaza, 58 personnes sont mortes de malnutrition et 242 autres à cause du manque de nourriture et de médicaments, depuis mars dernier seulement. Ce qui brise encore plus le cœur, ce sont les plus de 300 cas de fausses couches enregistrés, dus au manque de nutrition et à la détérioration des conditions sanitaires. Ces chiffres, bien qu’ils soient des statistiques, racontent des histoires de douleur et d’impuissance, où les utérus sont devenus un nouveau champ de bataille dans une guerre silencieuse.
Nous faisons face à une guerre biologique contre les utérus, où le fœtus est tué en silence par la faim, la faiblesse et l’absence des soins les plus élémentaires. Une réalité médicale : des corps affaiblis et des utérus épuisés. Les médecins de Gaza décrivent la situation comme « une catastrophe sanitaire indescriptible ». Chaque jour, ils reçoivent des femmes enceintes souffrant d’anémie sévère / fatigue générale et amaigrissement extrême / hypotension / malnutrition chronique / retard ou anomalies de croissance fœtale /pertes de connaissance dues au manque d’énergie.
« Il ne s’agit pas de luxe, mais des droits humains les plus fondamentaux : nourriture, fer, vitamines et soins médicaux. »
Les femmes oubliées : quand les utérus ne sont plus une priorité
Avec les déplacements massifs à Gaza, où des centaines de milliers de personnes ont fui leurs maisons à la recherche d’un abri sûr, la souffrance des femmes enceintes s’est aggravée de manière inédite. Beaucoup de centres de santé offrant un suivi prénatal et nutritionnel ont été fermés ou sont devenus inopérants à cause des bombardements et du manque de ressources. Avec l’afflux massif de blessés quotidiens causés par les attaques, les salles d’urgence et les hôpitaux sont entièrement dédiés aux cas graves.
Dans cette réalité implacable, les cas de malnutrition, de faiblesse et de fausse couche sont négligés, sans bénéficier de priorité, malgré les risques mortels qu’ils posent à la mère et à l’enfant.
Un médecin témoigne : « Si ces femmes étaient venues à l’hôpital à un autre moment, nous aurions pu les aider. Mais aujourd’hui… la priorité est donnée à ceux qui saignent, pas à celles qui souffrent en silence. »
L’image des femmes enceintes abandonnées dans les coins des hôpitaux ou incapables même de s’y rendre illustre l’une des formes les plus brutales de discrimination imposée par la guerre et le siège, où la vie est troquée contre une autre vie, et où le salut d’un fœtus est ajourné pour sauver celui qui saigne sous nos yeux.
L’épreuve de l’accouchement : entre faim et mort lente
La grossesse exige un apport nutritionnel quotidien d’au moins 1800 à 2200 calories, avec des éléments essentiels comme le fer, le calcium, les protéines et l’acide folique. À Gaza, ce qui est disponible ne couvre même pas la moitié du minimum requis, ce qui entraîne : des accouchements prématurés / des bébés avec un poids très faible / des fausses couches fréquentes / des décès maternels ou fœtaux.
Des hôpitaux impuissants… des efforts surhumains
Le personnel médical à Gaza travaille sous une pression énorme, avec des moyens quasi inexistants. Entre les coupures d’électricité, le manque de médicaments et l’interruption de nombreuses aides extérieures, prendre en charge les femmes enceintes devient presque impossible. Les médecins qualifient leurs actions de « tentatives désespérées proches du miracle ».
Malheureusement, l’aide humanitaire n’arrive ni en quantité suffisante ni au bon moment, et couvre à peine une partie des besoins. Pire encore, certaines femmes ne peuvent même pas se permettre le transport pour accéder aux centres de santé.
Les fausses couches : un phénomène de plus en plus préoccupant
Les médecins estiment que le taux de fausses couches a augmenté de 30 à 40 % par rapport à la période d’avant-guerre. Les patientes qui arrivent à l’hôpital souffrent d’une carence sévère en fer, principale cause des hémorragies, ainsi que d’un manque d’acide folique nécessaire à la prévention des malformations congénitales. Ces femmes n’ont que leurs corps affaiblis par le siège, et des âmes qui luttent silencieusement contre la mort. Un médecin affirme :
« Chaque repas manquant peut signifier une vie manquante dans l’utérus, et nous en sommes témoins chaque jour. »
Le siège de Gaza n’est plus seulement une question politique — il est devenu une catastrophe humanitaire touchant les segments les plus vulnérables de la société : les femmes enceintes et les enfants. Chaque jour où une femme perd son bébé ou sort de la salle d’accouchement les mains vides, est un jour que le monde devrait inscrire dans son registre de négligence.
Ce qui se passe à Gaza n’est pas seulement un crime de guerre, c’est un crime contre la vie elle-même. Il est temps d’agir sérieusement et de toute urgence pour fournir de la nourriture, des soins médicaux, des compléments nutritionnels, et garantir leur accès à chaque femme enceinte qui se bat pour faire naître une nouvelle vie. »
Retrouvez l’ensemble des témoignages d’Abu Amir et Marsel :
*Abu Amir Mutasem Eleïwa est coordinateur des Projets paysans depuis 2016 au sud de la bande de Gaza et correspondant de l’Union Juive Française pour la Paix.
*Marsel Alledawi est responsable du Centre Ibn Sina du nord de la bande de Gaza, centre qui se consacre au suivi éducatif et psychologique de l’enfance.
Tous les deux sont soutenus par l’UJFP en France.
Cliquez ici pour consulter les Témoignages du 20 novembre 2023 au 5 janvier 2025 (partie 1 à 268) Cliquez ici pour consulter les Témoignages du 5 janvier au 9 mai 2025 (partie 269 à 392)
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Pour participer à la collecte « Urgence Guerre à Gaza » : HelloAsso.com
Les témoignages sont également publiés sur UJFP, Altermidi et sur Le Poing.