Une délégation diplomatique secouée par des tirs de l’armée sioniste

Daniel Vanhove, 24 mai 2025. Mercredi dernier, à l’entrée du camp de réfugiés de Jenin, en Cisjordanie occupée, l’armée du régime terroriste israélien a ouvert le feu sur une délégation diplomatique comprenant des ambassadeurs et des consuls de pays arabes et européens. Les diplomates se rendaient dans le camp pour « évaluer » – une fois encore ! – la crise humanitaire gravissime que les locaux traversent.

Janvier 2025, les habitants du camp de réfugiés de Jenin arrachés à leurs maisons par les forces d’occupation israéliennes avant la démolition du camp. (source)

Le ministère palestinien des Affaires étrangères a bien évidemment condamné cette attaque, déclarant qu’elle témoignait du « mépris systématique » d’’Israël’ pour le droit international et la souveraineté palestinienne.

De son côté, l’armée du régime terroriste israélien a affirmé que la délégation était entrée dans une zone interdite. Et, si aucun blessé n’a été rapporté, l’incident a quand même provoqué l’annulation instantanée de la visite.

Les réactions européennes ont été immédiates. Divers intervenants de plusieurs pays sont montés au créneau pour dénoncer le viol du Droit international par le régime colonial – est-ce vraiment nouveau ? – jugeant l’incident « inacceptable » pour les uns, « choquant » pour les autres, arguant que les diplomates devaient bénéficier de l’immunité liée à leur fonction. Tiens, donc…

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Voilà 25 ans qu’à l’Appel du président Yasser Arafat d’une protection internationale pour le peuple palestinien lors de la 2è Intifada, aucun de ces gouvernements n’a bougé le petit doigt, se limitant comme à leur habitude à des déclarations sans suite, si ce n’est quelques dons aux Palestiniens, plaçant ainsi le problème sur le plan humanitaire, alors que celui-ci est éminemment politique. Les Palestiniens n’ont pas besoin d’être assistés, ils ne demandent pas de cadeaux, ils demandent que les pays tiers soient conséquents avec leurs déclarations, arrêtent de soutenir le régime colonial israélien, et obligent ce dernier à se conformer au droit international et aux résolutions de l’ONU. Les Palestiniens mettent ainsi ces pays face à leurs contradictions : le droit n’est pas matière à géométrie variable, il doit s’appliquer de la même manière pour chacun.

Vu les massacres perpétrés par l’armée sioniste à l’encontre des civils palestiniens lors de la 2è Intifada, la société civile s’est alors mobilisée, et c’était le début des « Missions civiles d’Observation » dans les Territoires occupés, composées de bénévoles de tous pays, se rendant sans la moindre protection en Palestine pour tenter, par leurs moyens dérisoires, de s’interposer et servir de bouclier aux attaques brutales de l’armée sioniste contre les populations palestiniennes laissées à elles-mêmes.

Plusieurs y ont été blessés, quand certains y ont laissés leurs vies, comme Rachel Corrie, militante américaine d’ISM (International Solidarity Movement), écrasée par un bulldozer israélien à Gaza en mars 2003 quand elle se tenait devant une maison palestinienne pour empêcher qu’elle ne soit rasée ; ou Tom Hurndall, photographe britannique, lui aussi membre d’ISM, tué par balle à Rafah en janvier 2004 quand il voulait aider des enfants à se mettre à l’abri des tirs israéliens. Et quelques autres encore, Iain Hook, travailleur britannique de l’UNRWA assassiné en novembre 2002 à Jenin, et le réalisateur britannique toujours, James Miller, assassiné en mai 2003 dans la bande de Gaza, par un sniper israélien…

Faut-il rappeler mai 2010, quand 10 bénévoles turcs étaient assassinés par la soldatesque israélienne, lors de l’assaut de leur bateau « Mavi Marmara » en route pour venir en aide à la population de Gaza sous infâme blocus du régime sioniste ?

Ou plus récemment encore, quand 7 humanitaires travaillant pour l’ONG américaine World Central Kitchen ont été tués par une frappe dans le centre de Gaza. Sans parler de plus de 250 travailleurs humanitaires morts depuis le début du génocide en cours. Ils étaient membres des Nations-unies, notamment de l’UNRWA, ou d’ONG internationales comme Medical Assistance International (MAP), ou de Médecins sans frontières (MSF), ou du Croissant-rouge palestinien… et j’en passe…

Qu’ont fait les diplomates et les gouvernements à l’époque des Missions civiles ? Et qu’ont-ils fait, depuis les 19 mois du génocide avéré et confirmé par les instances internationales ? Rien, sinon quelques molles protestations, pour la forme. Alors, les cris d’orfraies poussés par les gouvernements pour dénoncer des tirs de semonce de l’armée sioniste, me laissent indifférent…

Parce que, depuis 25 ans, nous sommes quelques-uns à avertir et dénoncer ce qui se prépare, sans que personne en haut lieu n’ait pris le temps d’écouter, et n’ait eu le courage de tirer la sonnette d’alarme pour prendre des mesures concrètes afin d’empêcher que le pire n’advienne. Et il se déroule chaque jour sous nos yeux…

Parce que, depuis 25 ans, nous mettons en garde et alertons sur la détérioration des conditions de vie en Palestine, rendant impossible le projet des Accords d’Oslo de « 2 Etats vivant côte à côte », alors que des incultes pour ne pas dire des pleutres se bornent à ânonner ce mantra devenu depuis longtemps irréalisable, du fait de la poursuite du cancer de la colonisation israélienne tous azimuts.

Parce que, depuis 25 ans, nous avons multiplié les articles, les livres, les manifestations, les soirées-débats, les témoignages et reportages au retour de délégations civiles pour informer comme les Palestiniens nous le demandaient, et dénoncer les mensonges d’une presse de caniveau au service des gouvernements qui maquillent les faits pour préserver ce régime d’apartheid israélien dont ils nous répètent régulièrement son « droit à se défendre », quand il est sans le moindre doute l’occupant et l’agresseur. Et qu’il viole allègrement toutes les résolutions de l’ONU depuis des décennies.

Même au cours des derniers mois et malgré ses tentatives de censure, alors que le régime terroriste israélien commet ce que les plus hauts tribunaux internationaux désignent comme « génocide » que chacun peut vérifier sur ses écrans, nos gouvernements européens continuent à livrer des armes à ce régime assassin, et alimentent sans sourciller l’Accord d’association avec ‘Israël’, comme si de rien n’était.

En réalité, il en est de ce régime comme d’un enfant : à force de l’avoir gâté-pourri, nous voyons le résultat. Nous sommes face à un délinquant de la pire espèce, devenu incontrôlable. Un sondage récent vient d’annoncer que plus de 80% des Israéliens approuve l’expulsion forcée des Palestiniens de Gaza, et une majorité s’oppose à l’entrée d’aide humanitaire. La société israélienne est, je le répète une fois encore, une société profondément malade, profondément injuste, profondément raciste, bien éloignée de la démocratie dont elle se targue.

Quant à certains gouvernements arabes et leur Oumma fantasmée, toujours pressés pour satisfaire le couple maudit États-Unis/Israël jusqu’à ratifier la « normalisation » avec ce régime de terreur sioniste, ils auraient pu abréger les souffrances de leurs frères et sœurs palestiniens depuis longtemps, en coupant tout simplement l’approvisionnement en fuel de la machine de guerre sioniste.

Là, sous nos yeux épouvantés, le pire se déroule et nous assistons en direct à l’agonie de tout un peuple, enfants compris… sans qu’aucune des huiles en hauts-lieux ne prennent les mesures qu’une telle situation exige. Alors, peu importe que quelques diplomates aient eu une frayeur. Et qu’ils ne viennent surtout pas se présenter comme « victimes » : ils ne récoltent que le minimum de ce qu’en réalité ils méritent, et peuvent s’estimer heureux de s’en sortir à si bon compte ! Au train où vont les choses, la prochaine fois sera peut-être pire, pour eux aussi…