Dr Ezzideen, Gaza, 27 janvier 2025. Ce matin, j’ai parlé avec un ami qui avait été contraint de fuir vers le sud de Gaza. Sa voix à l’autre bout du fil portait le poids de l’épuisement, mais sous-jacente, une détermination inébranlable brûlait. Je lui ai demandé s’il avait l’intention de retourner au nord, là où se trouvait autrefois sa maison avant que les bombes ne la réduisent en décombres méconnaissables.
« Nous sommes déjà sur le chemin du retour », a-t-il dit.
« Nous allons essayer de planter une tente sur ce qui reste. »
J’ai hésité.
« Vous avez déjà une tente, là où vous êtes maintenant. Pourquoi revenir pour la réinstaller sur les décombres ? »
Sa réponse ne s’est pas fait attendre, elle est venue rapidement, tranchante comme une lame.
« Parce qu’elle est à moi. Quand je la plante sur les décombres de ma maison, je me sens libre. C’est chez moi. Ma maison. Là-bas, je ne suis pas juste un autre homme déplacé. »
J’ai pensé au mot « chez soi », qui s’accroche à l’âme comme un muscle à l’os, même lorsque la structure elle-même ne tient plus. À Gaza, le chez-soi n’est pas seulement fait de briques ou de béton. C’est la terre, le sol sous vos pieds, l’air chargé de l’odeur d’histoire et de douleur, la promesse tacite qu’aucune guerre, aucun missile, aucune ligne tracée sur une carte ne pourra vous priver de votre appartenance.
La guerre ici est en pause, du moins pour l’instant. Mais ce qui nous attend est un autre type de bataille, une bataille d’endurance, de reconstruction à partir de rien d’autre que des cendres et de la mémoire. Les habitants de Gaza s’y préparent à leur manière, mus par le même esprit que mon ami porte en marchant vers le nord, portant sa tente et son esprit de défi.
Dans les jours à venir, ils enterreront leurs morts et dresseront leurs tentes. Ils pleureront et reconstruiront, non pas parce qu’ils en ont les moyens, mais parce qu’il n’y a pas d’autre alternative. Partir serait oublier, trahir la terre qui a souffert à leurs côtés. Et donc ils rentrent, non pas pour survivre, mais pour récupérer ce qui leur appartient.
Les jours à venir seront éprouvants. Mais je pense à mon ami, à la détermination silencieuse contenue dans sa voix, et je réalise que la liberté n’est pas toujours l’absence de lutte. Parfois, c’est le courage de continuer malgré tout.
Article original en anglais sur le compte X du docteur Ezzideen/ Traduction MR