Témoignages de Gazaouis : La survie qui s’organise au jour le jour dans l’enfer de Gaza – partie 286 / 22 janvier  – Israël reprendra-t-il la guerre après avoir récupéré ses otages à Gaza ?

Brigitte Challande, 22 janvier 2025. C’est le terrible titre du texte que nous envoie Abu Amir au matin du 22 janvier.

« Incertitudes. Après 15 mois de guerre avec des victimes et des blessés quotidiens, un accord longtemps attendu a finalement été annoncé entre Israël et le Hamas pour un cessez-le-feu à Gaza et l’échange d’otages et de détenus. Toutefois, malgré la joie immense des habitants de Gaza et des familles des otages des deux camps, des inquiétudes quant à la durabilité de cet accord sont apparues.Au vu de la déclaration du président américain Donald Trump exprimant des doutes sur la durabilité de l’accord de cessez-le-feu à Gaza, les opinions et les analyses varient quant à la solidité de l’accord. Réussira-t-il dans ses deuxième et troisième phases ou échouera-t-il à mettre fin à une guerre qui a duré 471 jours ?

L’accord, qui est entré en vigueur le dimanche 19 janvier, est structuré en trois phases. La première phase prévoit la libération de 33 otages israéliens détenus à Gaza en échange d’environ 1.900 détenus palestiniens des prisons israéliennes.

De vives inquiétudes parmi les habitants de Gaza

Les habitants de Gaza ne font plus confiance aux décideurs des deux camps. Tout au long de la guerre et des résultats qui ont conduit à cet accord, il a été prouvé de manière concluante que les parties en conflit n’ont pas réussi à trouver une solution pendant 15 mois. Le sang versé, le nombre de morts et la destruction des biens n’ont incité aucune des parties à faire ne serait-ce qu’une petite concession pour mettre fin à la guerre. Les deux parties ont déclaré leur victoire dans cette guerre, mais aucune d’entre elles n’a gagné.

Les deux parties tentent d’imposer ce mensonge à leur peuple, mais en vain. Gaza a perdu plus de 47.035 morts et 111.091 blessés, sans compter la destruction massive des biens et des infrastructures. Israël a perdu des centaines de soldats, son économie a été fortement détruite et il a été isolé sur le plan international. À la fin, les deux parties déclarent avoir remporté la guerre. De quelle victoire parlent-ils ? C’est pourquoi les habitants de Gaza, mais aussi les Israéliens, craignent la reprise de la guerre et la perte de nouvelles vies.

Impasse potentielle

Des doutes importants pèsent sur la pérennité de l’accord conclu, alors que les parties entament les négociations « sensibles » de la deuxième phase, qui doit débuter 16 jours après la mise en œuvre de la première phase. Cette phase exige un retrait complet des forces israéliennes de Gaza et l’instauration d’un « calme durable ».La deuxième phase donnera probablement lieu à des discussions controversées, Israël devant décider de sa stratégie pour le « jour d’après » à Gaza. Israël cherche depuis longtemps à éliminer complètement le Hamas de la bande de Gaza et pourrait exiger le retrait du Hamas de la bande de Gaza comme condition pour mettre fin à la guerre.

Il est peu probable que le Hamas accepte de telles exigences, ce qui pourrait conduire à des impasses. La situation pourrait se compliquer et nécessiter des pressions internationales importantes sur le Hamas pour qu’il abandonne le contrôle de Gaza ou qu’il soit confronté à une reprise de la guerre.

En ce qui concerne les pressions internationales, il est encore trop tôt pour déterminer l’issue de cette phase. « Nous devons attendre de voir comment le nouveau président américain, Donald Trump, gérera cette phase le moment venu », ont noté certains analystes.

Il y a également une contradiction entre le désir de Trump de mettre en œuvre la première phase de l’accord et ses positions précédemment déclarées, qui s’alignent pleinement sur le but d’Israël d’atteindre ses objectifs de guerre, y compris l’éradication du Hamas. Comment peut-on souhaiter une trêve durable tout en discutant de l’élimination du Hamas ?

Les précédentes déclarations de Trump comprenaient souvent l’expression « achever la guerre, et non l’arrêter ou y mettre fin ». Le moment viendra peut-être où l’on demandera au Hamas de déposer les armes et de partir – une demande que le Hamas n’acceptera probablement pas.

Une phase de test

L’accord de cessez-le-feu actuel à Gaza représente une « phase de test », dont les résultats apparaîtront clairement à la fin de la première phase et au cours des négociations de la deuxième phase. L’accord pourrait soit devenir une trêve temporaire, soit évoluer vers un cessez-le-feu à long terme, mettant fin à la guerre. Cependant, de nombreuses voix en Israël critiquent l’accord et appellent à un retour à la guerre.

Le ministre israélien de la Sécurité nationale, Itamar Ben Gvir, et le ministre des Finances, Bezalel Smotrich, ont voté contre l’accord lorsque le cabinet de sécurité israélien l’a approuvé le 17 janvier. Bien que leurs votes n’aient pas affecté la décision, M. Netanyahou craint la conclusion de la première phase, car M. Smotrich a conditionné son soutien à un retour au combat après la première phase ou à sa démission du gouvernement.

Les négociations qui commenceront environ deux semaines après le début de la mise en œuvre de la première phase préciseront si Netanyahou sera satisfait de la libération des otages, d’autant plus que les objectifs déclarés de la guerre, qui sont représentés par l’élimination du Hamas, n’ont pas été atteints. Ils ont peut-être été partiellement atteints, mais l’élimination complète du Hamas n’a pas eu lieu, puisque le Hamas constitue toujours le gouvernement de facto à Gaza. »


Retrouvez l’ensemble des témoignages d’Abu Amir et Marsel :

*Abu Amir Mutasem Eleïwa est coordinateur des Projets paysans depuis 2016 au sud de la bande de Gaza et correspondant de l’Union Juive Française pour la Paix.

*Marsel Alledawi est responsable du Centre Ibn Sina du nord de la bande de Gaza, centre qui se consacre au suivi éducatif et psychologique de l’enfance.

Tous les deux sont soutenus par l’UJFP en France.

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