Munir Shafiq, 27 janvier 2023. On peut remarquer que récemment, les demandes pour mettre fin à la division ou pour rechercher la réconciliation ont cessé. C’est parce que la division qui s’est produite était nécessaire et qu’elle a été mise en œuvre sur le terrain. Le peuple palestinien n’a pas voulu d’unité dans le cadre des accords d’Oslo ni de tout autre projet appelant à une solution à deux États, pas plus qu’il n’a voulu s’accorder sur les résolutions internationales. Il n’est plus possible de s’unir sur la base d’une stratégie de libération ou de résistance, surtout après le clivage provoqué par les accords d’Oslo. En témoignent toutes les tentatives faites pour mettre fin à la division ou pour parvenir à une réconciliation sur la base d’un programme commun, qui ont échoué.
Nous pouvons ajouter que le résultat pratique qui s’est produit sur le terrain, à la lumière de la division, n’a pas été la destruction ou la crise de la lutte palestinienne ou de la cause palestinienne. Cela est également prouvé par le fait que le projet d’Oslo s’est soldé par un échec lamentable, et que la voie de la colonisation n’a pas atteint son objectif de liquider la cause palestinienne. Elle n’a pas empêché, mais plutôt facilité la poursuite des soulèvements et les a développés, puisque nous avons maintenant une bande de Gaza libérée, malgré le blocus. Nous y avons aussi une résistance armée, qui a mené une guerre après l’autre, jusqu’à imposer les règles d’engagement, et l’« unité » n’aurait pas atteint le dixième de sa force.
La bataille de l’Épée de Jérusalem en 2021 a eu lieu, ainsi que le soulèvement qui l’a accompagné et les manifestations dans les territoires palestiniens occupés en 1948 et en Cisjordanie. S’en est suivie l’escalade de la Résistance armée en Cisjordanie, qui a duré jusqu’à aujourd’hui, en ce début de 2023, et qui a atteint le point où les positions de la Brigade de Jénine et de la Tanière des Lions à Naplouse ont été consonlidées. Des affrontements ont également éclaté dans des dizaines de villages, de villes et de camps.
C’est la raison pour laquelle personne ne devrait désormais se moquer de ce qui s’est passé en termes de division, ou faire l’éloge de la réconciliation, ou de l’unité impossible ou imaginaire, ou théoriser que l’unité c’est la force et que la division c’est la faiblesse. On peut y répondre par l’expérience palestinienne, car, de manière réaliste, il y a eu de la force dans la division et de la faiblesse dans la réconciliation.
Bien sûr, il y a deux approches : l’une considère que la réalité et les résultats sur le terrain ont le dernier mot, et l’autre pense que la logique et les théories dans l’esprit de chacun ont le dernier mot dans la lecture de la réalité, même si elle est très différente.
Cela ne signifie pas que nous devrions en arriver à dire que la division menant au combat peut être une bonne chose et, dans le cas des Palestiniens, qu’elle est un mal généralisé et qu’elle ne peut être abordée. Cela a été démenti par l’expérience également, lorsqu’elle a été évitée.
La division peut se faire sous une couverture qui ne permet pas les effusions de sang ou les combats, et son reste est un mal nécessaire. Mais des résultats réalistes peuvent être obtenus dans une situation aussi positive que celle que nous connaissons actuellement. L’expérience l’a prouvé en répondant à ceux qui ont paniqué et s’attendaient au pire, à moins que la division ne prenne fin et que tout le monde soit uni.
Cependant, il existe une option qui a été éprouvée par l’expérience pratique, et il est possible qu’en sorte une conviction qui permet de transformer l’inévitable division, car il est trop tard pour revenir en arrière – compte tenu des accords d’Oslo -, en quelque chose de bon dans la confrontation avec l’ennemi.
Lorsque le président américain a présenté son projet appelé « Deal du siècle », il s’est heurté au rejet et à l’opposition des dirigeants de l’AP et de l’OLP en Cisjordanie. Il a également été accueilli avec un rejet catégorique et l’attaque ferme qu’il mérite contre les États-Unis et leur président par l’autre bord de la « division » dans la bande de Gaza.
Il y avait une large opposition populaire arabe et islamique, et tous ces facteurs se sont réunis en un instant, sans arrangement ou accord préalable, pour s’opposer au « deal du siècle », ainsi que pour le dénoncer et l’éliminer. Cela a conduit à son affaiblissement et à son échec final, sans sous-estimer l’importance de la chute de Donald Trump aux élections.
Lorsque la Bataille de l’Epée de Jérusalem a éclaté, à l’initiative intelligente de la résistance dans la bande de Gaza, du soulèvement dans les territoires palestiniens occupés et des manifestations de Cisjordanie en 2021, elle a uni le peuple palestinien, chez lui et à l’étranger, dans un moment unique et extraordinaire, permettant de récolter ses fruits sur le moment et par la suite.
Lorsque la Résistance a commencé à intensifier ses actions en 2022, en commençant par les confrontations dans la mosquée Al-Aqsa et à Jérusalem, et par les opérations de « loup solitaire » telles que l’opération Beersheba (par Muhammad Ghaleb Abu Al-Qia’an), l’opération Bnei Brak (par Dia Hamarsheh) et l’opération de la rue Dizengoff (par Raad Hazem), puis ont suivi les phénomènes de la Brigade de Jénine, et d’Ibrahim Al-Nabulsi à Naplouse, les funérailles des martyrs et, enfin, le phénomène de la Tanière des Lions, tout cela a soulevé l’enthousiasme populaire et été adopté par le public d’une manière sans précédent.
La rue palestinienne a commencé à connaître une unité généralisée, se rassemblant pour soutenir la Résistance en Cisjordanie, et lui fournissant tous les moyens de soutien et d’assistance, apparents et cachés.
Quant aux factions, chacune, selon ses capacités, ses compétences et son rôle, a commencé à unifier leurs positions sur le nouveau phénomène qu’est la Résistance en Cisjordanie.
Le résumé de la théorie ici est qu’il y a une réalisation d’unité généralisée qui se forme au même moment sur le terrain. Son impact et ses fruits émergent, car l’événement, l’action et l’atmosphère générale peuvent unir ceux qui n’ont pas pu être unis par le dialogue, les efforts et la sensibilisation, ou à cause de la division. Bien sûr, elle a toujours un impact, même lorsqu’elle ne réussit pas.
La question palestinienne est une question fédératrice ; l’hostilité à l’occupation et à ses crimes est également une question globale, et l’opinion publique générale est fédératrice. Toutefois, cette unité ne doit pas être une unité organisée avec une prise de conscience préalable, mais plutôt une unité qui peut s’imposer sur le terrain, comme l’indique l’expérience palestinienne à plus d’une occasion.
Bien entendu, cela ne signifie pas qu’il faut annuler les tentatives conscientes et organisées de réaliser l’unité, mais cela n’empêche pas non plus la formation d’une unité sous la bannière d’une question spécifique, d’un événement particulier ou d’un moment heureux sur le terrain.
Article en anglais paru sur Middle East Monitor le 27.01.2023 / Traduction MR. L’article original en arabe a été publié sur Arabi 21, le 24 janvier 2023.
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