Le paradigme des deux États, conjugué au génocide, tue les Palestiniens

Ramona Wadi, 8 avril 2025. Deux annonces en l’espace de quelques jours concernant un État palestinien, ou son absence, devraient suffire à démontrer que la communauté internationale joue des jeux diplomatiques à son propre avantage, et non à celui de quiconque autre.

« Il n’y aura pas de création d’un État palestinien », a déclaré le ministre israélien de l’Économie et de l’Industrie, Nir Barkat, sur la chaîne israélienne Channel 14. « Cela n’arrivera sous aucun prétexte. » Il a également exclu la création d’un État démocratique unique, pourtant prôné par de nombreux Palestiniens, après la décolonisation. Barkat a plutôt évoqué la coexistence de zones fragmentées au cœur des colonies et a fait référence au Mur de fer de Jabotinsky. « Si vous nous reconnaissez, nous vous aiderons. Si vous ne nous reconnaissez pas, nous vous dévasterons comme Gaza. » Le colonialisme et le génocide sont à l’ordre du jour pour Israël, et la communauté internationale est à deux doigts d’approuver cette horreur.

Mais pas ouvertement, du moins pour l’instant ; elle se concentre sur le paradigme défunt des deux États.

Lors d’une conférence de presse avec son homologue égyptien Abdel Fatah Al-Sissi, le président français Emmanuel Macron a annoncé l’organisation, avec l’Arabie saoudite, d’une « conférence internationale pour la solution à deux États ». Macron s’est également « opposé » au déplacement forcé de Palestiniens et à l’annexion de territoires. « Ce serait une violation du droit international et une grave menace pour la sécurité de toute la région, y compris celle d’Israël », a-t-il déclaré. Le génocide ne fait vraisemblablement pas partie du nouveau cadre juridique international.

Cette déclaration ne fait cependant qu’illustrer la volonté de la communauté internationale de s’en tenir à ses propres paradigmes imposés. Des années avant le génocide, et même avant les accords d’Abraham, le paradigme des deux États avait été déclaré obsolète. Enhardis par la réponse de la communauté internationale au génocide, qui a fait du récit des otages une priorité encore plus grande qu’Israël lui-même, les dirigeants israéliens sont devenus ouvertement véhéments dans leur opposition à un État palestinien.

Le génocide israélien a continué de modifier la réalité pour les Palestiniens, ainsi que pour la communauté internationale qui a permis ce changement depuis son approbation de la résolution 181 (II) de l’Assemblée générale des Nations Unies de 1947 sur le futur gouvernement de la Palestine (résolution de partage), donnant ainsi au « Plan de partage » son nom exact. Il fut un temps où le Secrétaire général des Nations Unies rappelait par intermittence qu’« il n’y a pas de plan B » et refusait catégoriquement d’envisager d’autres possibilités fondées sur la décolonisation. Le génocide qui a suivi est également en partie imputable à cette position, car le refus de la communauté internationale s’est strictement limité aux alternatives politiques palestiniennes. Les atrocités israéliennes ont toujours été acceptées en toute impunité.

Une conférence ne met pas fin au génocide et ne mettra pas en œuvre le paradigme des deux États.

Israël s’emploie à détruire et à décimer tout ce qui reste de la Palestine et des Palestiniens, et la communauté internationale ne fait rien pour l’arrêter, ni pour mettre fin au génocide. Au contraire, elle gaspillera du temps en conférences futiles pour faire gagner du temps à Israël. Pendant ce temps, le bilan des victimes palestiniennes israéliennes continue d’augmenter. L’État d’occupation continue également de s’emparer de nouvelles terres à Gaza sous couvert de sécurité. Et comment la conférence de Macron répondra-t-elle à l’opposition d’Israël au paradigme des deux États ? Plus pertinent encore, abordera-t-elle la manière dont le recours de la communauté internationale à des plans obsolètes alimente le génocide à Gaza ?

Au lieu de dénoncer le génocide israélien, Macron a condamné « la reprise des frappes israéliennes sur Gaza, qui constituent un recul dramatique pour la population civile, les otages, leurs familles et toute la région ». Bien sûr, Macron n’a pas besoin qu’on lui rappelle qu’Israël brûle vifs des Palestiniens, les projette en l’air ou les décapite. Nul besoin non plus qu’on lui rappelle les exécutions extrajudiciaires et les fosses communes découvertes, ni les décombres eux-mêmes qui servent de fosse commune aux milliers de Palestiniens encore ensevelis dessous. Mais c’est précisément ce qui permet la farce des deux États : des euphémismes méprisables – « recul dramatique » ? Honte à lui – qui entretiennent l’oubli politique dans un monde pleinement conscient.

Article original en anglais sur Middle East Monitor / Traduction MR