Ramona Wadi, 24 décembre 2024. En « territoire ennemi » – l’euphémisme utilisé par Israël pour désigner Gaza –, on est au-delà du dérisoire et on peut voir l’armée israélienne détruire les infrastructures de Gaza pour tuer des Palestiniens, tout en construisant des infrastructures pour ses soldats. Ynet News a rapporté la construction d’un refuge pour les soldats israéliens où ils peuvent se détendre, se reposer et profiter du confort, notamment de l’accès à l’eau, aux services médicaux et de santé mentale, tout en commettant un génocide contre les Palestiniens.
L’article décrit l’établissement comme « une petite retraite au bord de la mer » qui « offre aux soldats une rare pause dans leurs missions épuisantes dans la bande de Gaza ». Il est anormal de penser au luxe à quelques mètres des victimes du génocide à Gaza, mais c’est là qu’Israël excelle : normaliser l’anormal. Et pour ajouter au sarcasme, l’article se lit comme une publicité pour un complexe de vacances. Bien que jusqu’à présent limité à l’armée, Jared Kushner doit être fier que ses idées sur « l’immobilier de premier choix en bord de mer à Gaza » aient déjà été prises en compte.
Alors qu’Israël affame les Palestiniens pour s’assurer que le génocide continue, les soldats israéliens du refuge ont « des petits déjeuners somptueux qui rappellent un buffet d’hôtel ». Le rapport note que la table est dressée sur une pelouse verte. Les soldats disposent d’un espace barbecue qui offre plus que de la restauration rapide standard : « les steaks et autres morceaux de qualité sont grillés à la perfection ». Ils ont également accès à 99 % des médicaments dont ils peuvent avoir besoin, ils ont un espace pour le culte religieux, une zone de loisirs est en construction et, plus important encore, il y a une usine de dessalement qui peut produire 60.000 litres d’eau potable par jour.
Pendant ce temps, les Palestiniens de Gaza se sont fondus dans leur environnement de tentes au milieu de tonnes de décombres, où cultiver leur propre nourriture est impossible et où Israël utilise la nourriture elle-même comme une arme pour lui permettre de commettre des massacres. Leurs lieux de culte ont été décimés, tout comme leurs hôpitaux. Le traumatisme auquel les Palestiniens sont exposés depuis la Nakba de 1948 nécessitera une nouvelle terminologie descriptive, et qu’en est-il des praticiens de la santé mentale qui ont eux-mêmes subi des traumatismes à la suite du génocide ? Israël a détruit toute vie à Gaza pour construire une société coloniale, à commencer pour ses soldats.
Le dernier rapport de Human Rights Watch indique que depuis le 7 octobre 2023, Israël a privé les Palestiniens de l’accès à l’eau, qui était déjà rare à Gaza. L’Organisation mondiale de la santé a établi un minimum de 50 à 100 litres d’eau par personne et par jour pour répondre aux besoins de base. En 2021, chaque Palestinien de Gaza ne pouvait accéder qu’à 83 litres par jour. Depuis le 7 octobre 2023, la quantité est tombée à 2 à 9 litres par personne et par jour, soit bien moins que les 15 litres fixés comme minimum dans les situations d’urgence prolongées.
En octobre 2023, le ministre israélien de la Défense de l’époque, Yoav Gallant, a ordonné un siège complet de Gaza : « pas d’électricité, pas de nourriture, pas de carburant, tout est fermé. »
Contrairement à ces privations délibérées destinées à accroître les chances de réussite du génocide, les soldats israéliens récoltent le contraire, non pas sous forme de droits humains fondamentaux, mais sous forme d’avantages pour avoir commis le génocide. Bien entendu, l’avantage ultime est la réinstallation des colons sionistes à Gaza, dont l’armée israélienne pose les bases. Pendant ce temps, le monde ne se contente pas de rester assis, mais regarde, les bras croisés.
Article original en anglais sur Middle East Monitor / Traduction MR