Handala, 4-5 octobre 2025.- Cher Journal, hier a été un choc pour moi, comme tant d’autres jours ici, dans notre ghetto de Palestine. Je me suis dirigé vers le vieux salon de coiffure, ce petit havre de paix où nous, Palestiniens, nous réunissons pour nous amuser, plaisanter et faire comme si, l’espace d’un instant, le poids du monde ne nous écrasait pas. Nous regardions la télévision, encourageions un match de foot, essayant de voler un peu de normalité. Puis, soudain, le chaos a éclaté : les soldats de l’occupation israélienne ont envahi notre rue, lancé des grenades lacrymogènes et des coups de feu ont claqué dans l’air. Nous avons fermé les portes, éteint les lumières et sommes restés silencieux dans le noir, le cœur battant, attendant que le coup de pied enfonce la porte.

Invasion de Naplouse, 5 octobre 2025 (voir le reportage en images de WAFA)
Chacun d’entre nous imaginait le pire : coups, arrestations ou balles, simplement parce que nous existons en tant que Palestiniens. Mes jambes tremblaient, comme celles de mes potes, et nous essayions d’en rire, nous taquinant mutuellement à propos de nos tremblements, racontant des blagues noires sur ce qui pourrait arriver ensuite pour étouffer la terreur extérieure.
Une heure s’écoula, comme une éternité, avant que les soldats ne se retirent enfin. Je me suis glissé chez mes vieux parents, effrayés, qui envoyaient des textos inquiets sur mon téléphone.
Je les ai serrés dans mes bras, les ai embrassés sur les joues et me suis effondré dans mon lit, repensant au cauchemar auquel nous venions de survivre. Combien de temps encore, nous, Palestiniens, pouvons-nous tenir sous ce siège d’oppression sans fin ? Le sommeil a fini par me gagner à l’aube.
Le lendemain, je me suis réveillé en sursaut d’un cauchemar trempé de sueur, les troupes israéliennes me poursuivant comme une proie, toutes armes dehors, prêtes à en finir.
Je me suis réveillé au son des sirènes au loin, la poitrine serrée, le souffle court. Je suis sorti en titubant de ma chambre pour voir quel nouvel enfer se déroulait, et boum, une grenade lacrymogène a explosé juste devant notre porte. Ma chatte en panique griffait la fenêtre pour entrer ; je l’ai vite récupérée. Papa est revenu en courant de sa clinique voisine et, avec maman, tous deux septuagénaires, frêles et essoufflés, nous avons barricadé chaque porte et fenêtre pour nous protéger des produits chimiques suffocants contenus dans leur gaz. Leurs yeux étaient baignés de larmes, leurs visages tordus par la douleur du gaz, et cela a allumé un feu dans mes veines, une rage pure bouillonnant à la vue de mes vieux parents souffrant ainsi.
Ces derniers jours ? Pas une âme dans notre ville n’a levé un petit doigt « violent », aucune pierre lancée, aucune action de résistance.
Et pourtant, voilà que les forces israéliennes arrivent, profitant de la nuit pour envahir la ville, nous terrorisent pour exercer leur emprise, nous provoquer et ainsi trouver le moindre prétexte à l’escalade. Cela se produit au moins trois ou quatre fois par semaine ici. Ils ont également installé des grilles de fer aux entrées de notre ville pour surveiller nos allées et venues selon leurs caprices, comme des animaux en cage.
Ceci n’est qu’un aperçu cru et infime de l’enfer quotidien que nous, Palestiniens désarmés et sans défense, subissons sous l’occupation brutale et le régime d’apartheid d’Israël.
Quand le monde se réveillera-t-il ?
Article original en anglais sur le compte X de Handala / Traduction MR