Témoignages de Gazaouis : La survie qui s’organise au jour le jour dans l’enfer de Gaza – partie 171 / 17 septembre

Brigitte Challande, 18 septembre 2024. Le 17 septembre, Marsel nous transmet des informations officielles de Gaza :

« Ministère de l’Éducation : 11.000 étudiants tués, plus de 17.000 blessés et 500 écoles et universités bombardées dans la bande de Gaza depuis le 7 octobre.

Défense civile : Des dizaines d’appels de détresse nous parviennent de citoyens et de blessés coincés dans des maisons ciblées par l’occupation israélienne ce matin, à l’est du camp d’Al-Bureij, bloc “12”, pour les familles Abu Shawqa, Al-Batran et Al-Tarturi.

Nos équipes sont arrivées sur place, mais l’aviation de l’occupation israélienne les a ciblées, et l’un de nos membres a été blessé et a dû se retirer de la zone en raison de la dangerosité.

Nous exigeons que la Croix-Rouge internationale intervienne d’urgence et se coordonne pour permettre à nos équipes d’atteindre ces maisons pour sauver des dizaines de citoyens piégés.

Des familles entières ont été rayées de l’état civil lors du massacre d’Al-Bureij commis par l’occupation ce matin.

L’infirmier Ziyad Muhammad Al-Dalou, directeur adjoint du département de médecine interne de l’hôpital Al-Shifa de la ville de Gaza, a été tué dans les prisons de l’occupation, après son arrestation le 19 mars 2024. »

Le 17 septembre, l’équipe d’Abu Amir nous transmet le rapport de leurs activités :

« Pulvérisation d’insecticides dans les camps

Les camps de déplacés de la bande de Gaza connaissent des conditions humanitaires extrêmement difficiles en raison de la destruction des infrastructures due à la guerre en cours, qui a exacerbé de graves problèmes sanitaires. Le plus important de ces problèmes est la propagation des mares d’eaux usées sur les routes du camp et entre les tentes, ce qui constitue un environnement idéal pour la reproduction des insectes et des rongeurs. Ces nuisibles n’affectent pas seulement les personnes déplacées physiquement, mais provoquent également la propagation de maladies et d’épidémies, ce qui accroît les souffrances de milliers de personnes vivant dans ces conditions difficiles.

En l’absence de systèmes d’assainissement adéquats et de services de base, les insectes et les rongeurs font désormais partie intégrante de la vie quotidienne des personnes déplacées, qui souffrent constamment de piqûres d’insectes, en plus des maladies qu’ils transmettent, telles que les maladies de la peau et les infections respiratoires, qui détériorent encore davantage la situation sanitaire dans les camps. Cette réalité représente un grand risque pour la vie des enfants et des personnes âgées, qui souffrent en particulier de maladies pouvant être transmises par les insectes et les rongeurs.

Face à ces conditions difficiles, les équipes de l’UJFP jouent un rôle crucial dans l’amélioration de l’environnement sanitaire à l’intérieur des camps. Cette semaine, nos équipes ont mené une campagne de pulvérisation à grande échelle dans le camp d’Al-Wafa, l’un des camps les plus touchés par la propagation de ces nuisibles. Cette campagne est une étape importante pour réduire la propagation des insectes et des rongeurs, et fait partie des efforts continus pour améliorer la santé et les conditions de vie des personnes déplacées.

Les opérations de pulvérisation ne se limitent pas à l’élimination temporaire des insectes et des rongeurs, mais contribuent également à améliorer l’état psychologique des personnes déplacées. Après les opérations de pulvérisation, les personnes déplacées constatent la disparition des insectes et des rongeurs pendant un certain temps, ce qui leur procure une sorte de soulagement temporaire de leurs piqûres et des problèmes de santé qui les accompagnent. Cette période de répit est très importante pour les personnes déplacées qui vivent dans des conditions difficiles, car elle les soulage d’une partie du stress psychologique qu’elles subissent quotidiennement en raison de la prolifération des insectes à l’intérieur du camp.

En outre, les opérations de pulvérisation jouent un rôle important dans la prévention de la propagation des maladies. Les insectes tels que les mouches, les moustiques et les rongeurs sont d’importants vecteurs de maladies infectieuses. Leur élimination, même temporaire, contribue donc à protéger les personnes déplacées contre de nombreuses maladies qui peuvent leur être transmises. Ces efforts sont essentiels au maintien de la santé publique dans les camps, notamment en raison de la détérioration des infrastructures et du manque de soins de santé adéquats.

Malgré l’importance de ces efforts, le plus grand défi consiste à les poursuivre et à les étendre à tous les camps souffrant de ces problèmes. De nombreux camps sont encore inscrits sur des listes d’attente pour bénéficier d’opérations de pulvérisation et de désinfection. Ces camps souffrent des mêmes conditions sanitaires difficiles et ont besoin d’une intervention urgente pour alléger leurs souffrances. Avec l’augmentation du nombre de personnes déplacées et la persistance de conditions difficiles, il devient nécessaire d’intensifier les efforts de pulvérisation et de désinfection afin de garantir un environnement plus sain aux personnes déplacées.

En outre, l’importance de ces opérations ne se limite pas à la seule dimension sanitaire, mais elles contribuent également à rassurer et à réconforter psychologiquement les personnes déplacées. Avec la disparition des insectes et des rongeurs, même temporaire, les personnes déplacées ressentent une amélioration psychologique et espèrent améliorer leurs conditions en général. Ces périodes temporaires de réconfort sont très importantes pour eux, compte tenu des circonstances difficiles dans lesquelles ils se trouvent, et permettent d’atténuer les énormes pressions psychologiques qu’ils subissent. »

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« Atelier de soutien psychologique pour les hommes

Alors que la guerre contre Gaza se poursuit depuis près d’un an, les défis économiques et sociaux à l’intérieur de la bande de Gaza ont connu une escalade sans précédent, en particulier dans les camps de déplacés. Ces camps, qui souffrent de conditions de vie difficiles, sont devenus un environnement propice à la propagation de la violence en raison des pressions psychologiques et sociales subies par leurs résidents. L’un des groupes les plus touchés est celui des jeunes et des hommes, qui souffrent d’un sentiment d’impuissance et de désespoir en raison des taux élevés de chômage et de pauvreté, et de leur incapacité à subvenir aux besoins fondamentaux de leur famille. Ces conditions difficiles exercent une forte pression sur l’état psychologique des jeunes et des hommes et les poussent à s’engager dans des pratiques violentes en réponse aux circonstances qui les entourent.

Les hommes chefs de famille ressentent une pression énorme, car ils ont la responsabilité de fournir de la nourriture, un abri et les besoins de base de leur famille, et avec le manque d’opportunités et de ressources, le sentiment d’impuissance se transforme en une grande pression psychologique. Ces pressions entraînent de graves changements d’humeur et d’émotions et créent un environnement de tension qui se transmet à la famille et à la société. Souvent, cette pression psychologique conduit à des manifestations de violence au sein de la société, les hommes et les jeunes devenant vulnérables à des comportements agressifs en raison du manque de soutien et d’orientation psychologiques.

Dans ce contexte, la nécessité de fournir un soutien psychologique est devenue vitale et ne peut être ignorée. L’UJFP a pris conscience de l’importance de cet aspect et a lancé une série d’ateliers de soutien psychologique ciblant les jeunes hommes et les hommes à l’intérieur des camps de déplacés. L’objectif principal de ces ateliers est de fournir un espace sûr pour que les jeunes hommes et les hommes puissent exprimer leurs sentiments, discuter des défis psychologiques auxquels ils sont confrontés et trouver des moyens d’atténuer les pressions psychologiques et émotionnelles qu’ils subissent.

Cette semaine, les équipes de l’UJFP ont organisé un atelier de soutien psychologique dans le camp d’Al-Wafa, au centre de la ville de Deir al-Balah. L’atelier s’est concentré sur des activités sportives et récréatives visant à libérer les participants de leur énergie négative. Les activités sportives n’étaient pas seulement un moyen de divertissement, mais plutôt un outil puissant qui aide les hommes et les jeunes hommes à se débarrasser du stress et de la frustration accumulés. Les activités interactives ont également permis aux jeunes hommes et aux hommes de communiquer, ce qui les a aidés à tisser des liens positifs et à réduire les sentiments de solitude et d’isolement.

L’un des principaux avantages de ces ateliers est qu’ils donnent aux participants l’occasion de parler de leurs dures expériences pendant le déplacement, et des situations qu’ils ont vécues sous les frappes aériennes ou en fuyant la mort. Ces possibilités d’expression sont essentielles dans le processus de psychothérapie, car elles aident les hommes à libérer leurs sentiments refoulés et à les transformer en énergie positive. Un autre sujet abordé lors de l’atelier était la peur de l’hiver à venir. De nombreux participants ont exprimé leur extrême anxiété face à l’approche du froid glacial, compte tenu du manque d’équipement approprié pour affronter le froid hivernal à l’intérieur des camps. Cette peur augmente leur état de stress et d’anxiété, et il est donc urgent de leur apporter un soutien psychologique.

En plus de fournir un environnement sain pour une libération psychologique, ces ateliers contribuent de manière significative à la réduction des taux de violence dans les camps. Le soutien psychologique permet aux hommes de retrouver leur équilibre émotionnel, ce qui réduit les cas de colère et les explosions émotionnelles qui peuvent se transformer en violence envers eux-mêmes ou envers les autres. Grâce à ces ateliers, les participants apprennent à gérer leurs pressions psychologiques de manière plus calme et plus équilibrée, ce qui améliore leur humeur générale et leur capacité à faire face aux défis quotidiens de manière plus efficace.

L’importance de ces ateliers ne se limite pas aux individus, mais s’étend à la famille et à la communauté. L’amélioration de la santé mentale des hommes et des jeunes contribue à créer un environnement familial plus stable et plus calme, dans lequel le père ou le chef de famille est plus à même de résister aux pressions et d’interagir positivement avec les membres de sa famille. Soutenir les hommes sur le plan psychologique peut également contribuer à améliorer leur capacité à apporter un soutien émotionnel à leur famille, ce qui réduit les tensions au sein de la famille dans son ensemble.

Le soutien psychologique joue un rôle fondamental dans la réduction du sentiment d’impuissance que ressentent de nombreux hommes, car il les aide à comprendre que ce qu’ils vivent n’est pas le résultat d’un échec personnel, mais plutôt le résultat des conditions difficiles imposées par la guerre.

La poursuite de ces ateliers et de ces programmes psychologiques est essentielle pour assurer un certain équilibre psychologique et social dans les camps. Compte tenu de la guerre en cours et de l’absence de solutions immédiates, il devient urgent de fournir un soutien psychologique, non seulement pour soulager les souffrances immédiates, mais aussi pour renforcer la résilience à long terme qui aide les personnes déplacées à vivre dans ces circonstances difficiles. Le soutien psychologique n’est pas un luxe dans ces situations, mais plutôt un besoin fondamental pour maintenir la stabilité psychologique à la lumière des crises récurrentes.

Le rôle joué par l’UJFP dans ce contexte ne se limite pas à l’organisation d’ateliers de soutien psychologique, mais comprend également la mise en place de nombreux programmes et projets visant à améliorer la vie quotidienne des personnes déplacées. Qu’il s’agisse de soutien matériel ou psychologique, ces efforts font partie intégrante du soutien humanitaire global dont les résidents des camps ont besoin pour surmonter les difficultés quotidiennes auxquelles ils sont confrontés. En fin de compte, la stabilité ne peut être atteinte dans de telles circonstances que par l’intégration des efforts visant à fournir un soutien psychologique, économique et social aux personnes touchées. »

Photos et vidéos ICI.


Retrouvez l’ensemble des témoignages d’Abu Amir et Marsel :

*Abu Amir Mutasem Eleïwa est coordinateur des Projets paysans depuis 2016 au sud de la bande de Gaza et correspondant de l’Union Juive Française pour la Paix.

*Marsel Alledawi est responsable du Centre Ibn Sina du nord de la bande de Gaza, centre qui se concacre au suivi éducatif et psychologique de l’enfance.

Tous les deux sont soutenus par l’UJFP en France.

1ère partie des témoignages : du 20.11 au 15.12. 2ème partie : du 18 au 27.12. 3ème partie : du 30.12.2023 au 01.01.2024. 4ème partie : les 3 et 4 janvier. 5ème partie : les 7 et 8.01. 6ème partie : les 9 et 10 janvier. 7ème partie : du 11 au 15 janvier. 8ème partie : du 16 au 18 janvier. 9ème partie : nouveaux récits, du 16 au 18 janvier. 10ème partie : les 18 et 19 janvier. 11ème partie : les 19 et 20 janvier. 12ème partie : les 21 et 22 janvier. 13ème partie : 22 janvier. 14ème partie : 23-24 janvier. 15ème partie : 25 et 26 janvier. 16ème partie : 25 au 27 janvier. 17ème partie : 28 janvier. 18ème partie : 29 et 30 janvier. 19ème partie : 30.1 et 2.2. 20ème partie : 3 au 6 février. 21ème partie : 7 et 8 février. 22ème partie : 8 février. 23ème partie : 10 au 12 février. 24ème partie : 13 et 14 février. 25ème partie : 16 février. 26ème partie : du 17 au 19 février. 27ème partie : 20-21 février. 28ème partie : 23 février. 29ème partie : 24-26 février. 30ème partie : 26-29 février. 31ème partie : 29 février/1er mars. 32ème partie : 1-2 mars. 33ème partie : 3-4 mars. 34ème partie : 4 mars. 35ème partie : 5 mars. 36ème partie : 6-7 mars. 37ème partie : 8-9 mars. 38ème partie : 10-11 mars 2024. 39ème partie : 13 mars. 40ème partie : 14 mars. 41ème partie : 14-15 mars. 42ème partie : La situation des pêcheur.e.s. 43ème partie : 17 mars. 44ème partie : 19 mars. 45ème partie : 22 mars. 46ème partie : 23 mars. 47ème partie : 23 mars (suite). 48ème partie : 25 mars. 49ème partie : 27-28 mars. 50ème partie : 29-30 mars. 51ème partie : 1-2 avril. 52ème partie : 3 avril. 53ème partie : 5 avril. 54ème partie : 3-6 avril. 55ème partie : 7 avril. 56ème partie : 10 avril. 57ème partie : 11-12 avril. 58ème partie : 14 avril. 59ème partie : 15-16 avril. 60ème partie : 16-17 avril. 61ème partie : 17/18 avril. 62ème partie : 19 avril. 63ème partie : 19 avril. 64ème partie : 23 avril. 65ème partie : 26 avril. 66ème partie : 28 avril – Réflexions d’Abu Amir. 67ème partie : 28 avril. 68ème partie : 1-2 mai. 69ème partie : 1-4 mai. 70ème partie : 5-6 mai. 71ème partie : 6 mai. 72ème partie : 7 mai (1). 73ème partie : 7 mai (2). 74ème partie : 9 mai. 75ème partie : 9 mai (1). 76ème partie : 10 mai. 77ème partie : 11 mai. 78ème partie : 12 mai. 79ème partie : 14 mai. 80ème partie : 17 mai. 81ème partie : 18 mai. 82ème partie : 19 mai. 83ème partie : 19-20 mai. 84ème partie : 21 mai (1). 85ème partie : 21 mai (2). 86ème partie : 23-24 mai. 87ème partie : 23-24 mai (1). 88ème partie : 26 mai. 89ème partie : 27 mai. 90ème partie : 31 mai. 91ème partie : 1er juin. 92ème partie : 2 juin. 93ème partie : 3 juin. 94ème partie : 4 juin. 95ème partie : 6 juin. 96ème partie : 7 juin. 97ème partie : 3-4-5 juin. 98ème partie : 8 juin. 99ème partie : 1-6 juin. 100ème partie : 8 juin. 101ème partie : 10-12 juin. 102ème partie : 12 juin. 103ème partie : 8 et 13 juin. 104ème partie : 13 juin. 105ème partie : 17 juin. 106ème partie : 19 juin (1). 107ème partie : 19 juin (2). 108ème partie : 22 juin. 109ème partie : 23 juin. 110ème partie : 24 juin. 111ème partie : 25 juin. 112ème partie : 26 juin. 113ème partie : 26 juin (1). 114ème partie : 27 juin. 115ème partie : 28 juin. 116ème partie : 30 juin. 117ème partie : 2 juillet. 118ème partie : 3 juillet. 119ème partie : 5 juillet. 120ème partie : 6 juillet. 121ème partie : 7 juillet. 122ème partie : 8 juillet. 123ème partie : 9 juillet. 124ème partie : 10 juillet. 125ème partie : 12 juillet. 126ème partie : 13 juillet. 127ème partie : 12-13 juillet. 128ème partie : 19 juillet. 129ème partie : 21 juillet. 130ème partie : 23 juillet. 131ème partie : 20-26 juillet. 132ème partie : 27 juillet. 133ème partie : 28 juillet. 134ème partie : 29 juillet. 135ème partie : 30 juillet. 136ème partie : 30 juillet-1. 137ème partie : 31 juillet. 138ème partie : 3 août. 139ème partie : 4 août. 140ème partie : 7 août. 141ème partie : 7 août-1. 142ème partie : 9 août. 143ème partie : 10 août. 144ème partie : 10 août-1. 145ème partie : 11 août. 146ème partie : 13 août. 147ème partie : 15 août. 148ème partie : 17 août. 149ème partie : 18 août. 150ème partie : 19 août. 151ème partie : 19 août/1. 152ème partie : 20 août. 153ème partie : 21 août. 154ème partie : 22-23 août. 155ème partie : 25 août. 156ème partie : 27 août. 157ème partie : 27 août-1. 158ème partie : 29 août. 159ème partie : 30 août. 160ème partie : 30 août-1. 161ème partie : 3 septembre. 162ème partie : 4 septembre. 163ème partie : 6 septembre. 164ème partie : 6 septembre-1. 165ème partie : 9 septembre. 166ème partie : 10 septembre. 167ème partie : 11 septembre. 168ème partie : 13 septembre. 169ème partie : 14 septembre. 170ème partie : 15 septembre.

Pour participer à la collecte "Urgence Guerre à Gaza" : HelloAsso.com

Les témoignages sont également publiés sur UJFP; Altermidi.org