Les cadeaux de Noël de Trump

Belén Fernández, 22 décembre 2025. Si ma mémoire est bonne, c’est la veille de Noël 1992 que j’ai découvert que le Père Noël n’existait pas. J’avais 10 ans et j’étais en primaire à Austin, au Texas. Bien que j’aie déjà récusé l’existence de la Petite Souris et du Lapin de Pâques, je croyais encore au Père Noël, apparemment réticente à l’idée de quitter mon enfance.

Quand j’ai surpris mes parents en train de distribuer les cadeaux censés venir du Pôle Nord, j’ai pleuré.

Plus de trente ans plus tard, de nombreux Américains se sentent tout aussi trompés en cette période de fêtes par un autre homme en rouge – rouge MAGA, pour être précis.

Alors que le président des États-Unis, Donald Trump, approche de la fin de sa première année de mandat, il a négligé de tenir la quasi-totalité de ses promesses principales, hormis les expulsions massives qui ont contribué à transformer le pays en un État policier zélé.

Un récent sondage Reuters/Ipsos indique que la cote de popularité de Trump n’atteint que 39 %, alors que les Américains sont confrontés à un coût de la vie exorbitant, notamment à la flambée des prix des fruits, des légumes et de la viande, ainsi qu’à la hausse des loyers et des tarifs d’électricité.

La paralysie des services fédéraux, cette année, a exposé des millions de personnes à un risque réel de famine, une situation difficilement compatible avec le programme « Rendre sa grandeur à l’Amérique ».

Les pertes d’emplois consécutives à cette paralysie ont fait grimper le taux de chômage à 4,6 %, son plus haut niveau depuis près de cinq ans. Selon Reuters, « de nombreux économistes estiment que les employeurs ont freiné les embauches en raison de ce que certains ont décrit comme un choc provoqué par les droits de douane imposés par Trump sur les importations ».

Force est donc de constater que Trump a échoué lamentablement dans sa promesse de redresser l’économie américaine. Mais dans son propre monde d’exagérations et de fictions, le président a attribué à l’économie actuelle la note de « A+++++ », tout en qualifiant la prétendue crise de « comédie financière » du pays de « canular » démocrate destiné à ternir son image.

Il est vrai que les États-Unis n’ont jamais été particulièrement réputés pour leur accessibilité financière. Après tout, cela irait à l’encontre même du principe du capitalisme sauvage et de la hiérarchie sociale sur laquelle repose la ploutocratie.

Et si Républicains et Démocrates se prétendent idéologiquement opposés, ces partis sont les deux faces d’une même pièce lorsqu’il s’agit de perpétuer la tyrannie racialisée des élites et de faire en sorte que la pauvreté demeure une cause majeure de mortalité dans l’un des pays les plus riches du monde.

Je suis actuellement en vacances chez ma mère à Louisville, dans le Kentucky, où une simple course au supermarché l’autre jour nous a coûté 237,27 $ – soit presque l’équivalent du loyer mensuel de ma maison en bord de mer dans le sud du Mexique. Notre panier, qui n’était pas plein, contenait un seul produit carné et aucune boisson alcoolisée.

Louisville, soit dit en passant, fut le théâtre du meurtre tristement célèbre de Breonna Taylor, une technicienne des urgences noire de 26 ans, non armée, tuée par la police en mars 2020.

Plus tôt cette année, le ministère de la Justice américain a requis une peine d’un seul jour de prison contre un ancien policier reconnu coupable de la mort de Taylor, survenue sous la première administration Trump.

L’agent a finalement écopé d’une peine légèrement plus lourde de 33 mois.

En effet, si votre liste de souhaits pour les fêtes inclut la fin du racisme systémique ou des violences policières, vous risquez d’être très déçu.

Quant aux autres méfaits récents du ministère de la Justice, au moins 16 dossiers relatifs à l’affaire du défunt financier et pédophile Jeffrey Epstein ont inexplicablement disparu samedi du site web du ministère, peu après leur publication.

Parmi les documents disparus figurait une photographie de Trump, qui avait auparavant qualifié de « canular démocrate » l’indignation nationale suscitée par les manoeuvres du gouvernement pour entraver la publication des documents concernant Epstein.

D’autres documents récemment publiés ont été fortement expurgés ou entièrement noircis, constituant, selon les mots de Marina Lacerda, une survivante, « une nouvelle gifle » pour les victimes d’Epstein.

Autrement dit, le contexte national actuel n’est guère propice à la joie des fêtes.

Mais voilà que moi aussi je propage des « canulars ».

Parallèlement, la période des fêtes a été marquée par la poursuite des bombardements délibérés de bateaux par Trump à proximité du Venezuela et les exécutions extrajudiciaires de marins qui en découlent, soi-disant au nom de la lutte contre le « narcoterrorisme » vénézuélien.

Les États-Unis ont désormais étendu leur arsenal anti-vénézuélien autorisant également le piratage de pétroliers. De son côté, Trump a alourdi la liste de ses prétextes fallacieux en publiant sur les réseaux sociaux – en lettres majuscules, comme toujours – une allégation manifestement absurde selon laquelle le Venezuela aurait volé du « pétrole, des terres et d’autres biens » aux États-Unis. Jeudi, lors d’une interview accordée à NBC, le président n’a pas exclu une guerre contre le Venezuela.

À l’autre bout du monde, le génocide des Palestiniens par Israël se poursuit sans relâche dans la bande de Gaza, sous couvert d’un cessez-le-feu négocié par Trump. À l’instar de son prédécesseur démocrate Joe Biden, Trump a déversé des milliards de dollars, provenant des impôts des contribuables américains, dans l’État génocidaire.

Un cadeau de Noël massif..

Voici la saison de Noël cette année, et pas beaucoup de raison de se réjouir.

Article original en anglais sur Al-Jazeera / Traduction MR