Célébrer la révolution tout en l’annihilant, c’est le style d’Abbas

Ramona Wadi, 7 janvier 2025. Le leader de l’Autorité palestinienne Mahmoud Abbas aurait mieux fait de se taire à l’occasion du 60e anniversaire du lancement de la résistance de l’Organisation de libération de la Palestine (OLP) contre l’occupation israélienne. Mais les anniversaires sont trop importants pour Abbas. Il a donc régalé les Palestiniens d’un discours qui valorisait la lutte anticoloniale palestinienne, tandis que les services de sécurité de l’Autorité palestinienne poursuivaient leurs raids en Cisjordanie occupée, arrêtant et tuant des Palestiniens pour avoir fait précisément ce pour quoi Abbas glorifiait l’OLP.

Communiqué unitaire des différents groupes de la résistance palestinienne à Jenin pour protester contre la répression sanglante de l’armée palestinienne, aux ordres de l’AP. (Source : Qudsn.co.)

Rappeler un passé qui ne sert plus l’AP est en soi une spirale descendante. Si Abbas a rappelé les premiers jours de la résistance anticoloniale de l’OLP, il n’a pas attiré l’attention sur les moments où il a ridiculisé la lutte anticoloniale palestinienne, en particulier à Gaza. Et à l’heure où les ministres israéliens appellent à ce que la Cisjordanie occupée subisse le même génocide que Gaza, Abbas accélère la mise en œuvre de cette mesure en utilisant les services de sécurité de l’AP pour cibler les dirigeants de la résistance.

Bien sûr, Abbas a en tête un objectif plus primaire : il veut éliminer toute opposition palestinienne à son régime illégitime (le mandat pour lequel il a été élu a pris fin en 2009). Et ce faisant, Abbas laisse les Palestiniens sans aucune forme de protection, car les services de sécurité existent pour s’opposer à la résistance palestinienne en collaborant avec Israël afin de promouvoir l’AP, quel qu’en soit le prix pour le peuple palestinien.

D’ici là, cependant, Abbas est libre de nous rappeler que, par le passé, les dirigeants révolutionnaires de l’OLP « étaient pleinement conscients de l’importance du pouvoir du peuple palestinien de prendre ses propres décisions, considérant cela comme la seule voie vers la libération, le retour et l’exercice de son droit à l’autodétermination librement sur sa patrie ». L’importance du Fatah au sein de l’OLP, a-t-il ajouté, « a préservé la décision nationale palestinienne indépendante au terme d’une lutte longue et ardue, marquée par d’immenses sacrifices consentis par le peuple palestinien dans la poursuite de sa cause nationale ».

C’est un charabia glorifié qui, une fois démêlé, ne fait qu’exposer le fait que le Fatah, synonyme de l’AP, a offert les Palestiniens comme chair à canon à Israël dans sa course aux contraintes internationales, au financement des donateurs et à la mascarade des deux États.

Le temps est venu, a déclaré Abbas, que les Palestiniens obtiennent leur indépendance. Bien sûr, dans le cadre des deux États qui n’offrent aucune indépendance du tout, et encore moins la fin de la colonisation. Mais si ce moment est venu, alors pourquoi Abbas crée-t-il encore des obstacles pour que les Palestiniens obtiennent leur indépendance ? Pourquoi ne pas faire une simple déclaration selon laquelle la Palestine n’aurait jamais dû être colonisée, ou cela interférerait-il avec les avantages temporaires que Ramallah récolte dans le processus jusqu’à une éventuelle annihilation par le génocide ?

A l’occasion du 60e anniversaire du début de la révolution de l’OLP, un dirigeant engagé dans la décolonisation aurait promis une protection ultime aux Palestiniens en première ligne des activités de résistance. Un tel dirigeant aurait promis de lutter avec le peuple, au lieu de se démarquer de lui et de revendiquer seulement ce qui convient à une commémoration annuelle pour glorifier ce qu’il craint le plus : la révolution qui se tourne maintenant vers l’intérieur pour sauver les Palestiniens de la trahison dans leur propre arrière-cour.

Si Abbas soutenait vraiment la libération palestinienne, l’AP ne travaillerait pas activement à la prochaine phase du génocide d’Israël. On ne peut pas célébrer et commémorer la révolution en l’annihilant, mais c’est le style d’Abbas.

Article original en anglais sur Middle East Monitor / Traduction MR