EuroMed : « Le visage le plus sanglant de son génocide : Israël a tué 2.100 nourrissons et jeunes enfants palestiniens à Gaza »

Euro-Med Human Rights Monitor, Territoire palestinien, 14 août 2024. L’armée israélienne a tué 2.100 nourrissons et jeunes enfants palestiniens de moins de deux ans, sur les quelque 17.000 enfants qu’elle a tués dans la bande de Gaza depuis le début de son génocide le 7 octobre 2023.

Le nombre d’enfants palestiniens – qu’il s’agisse de nourrissons ou d’enfants en général – tués par l’armée israélienne est effroyable, et le rythme de leur massacre est sans précédent dans l’histoire des guerres modernes. Il représente également une tendance dangereuse fondée sur la déshumanisation des Palestiniens dans la bande de Gaza. L’armée israélienne cible les Palestiniens et leurs enfants quotidiennement, méthodiquement et largement, de la manière la plus odieuse et la plus brutale possible, et pratiquement sans interruption depuis 10 mois consécutifs.

En raison des bombardements israéliens sur des maisons, des immeubles, des quartiers résidentiels, des centres d’accueil et des tentes de déplacés, de nombreux enfants ont perdu des membres et/ou leur tête. Il s’agit d’une violation flagrante des règles de distinction, de proportionnalité, de nécessité militaire, c’est-à-dire de l’obligation légale et morale de prendre les précautions nécessaires pour minimiser les décès de civils et d’enfants.

L’équipe de terrain d’Euro-Med Monitor a documenté aujourd’hui, mardi 13 août, le meurtre des jumeaux Aser et Aysal Muhammad Abu al-Qumsan, âgés de quatre jours. Les jumeaux ont été tués ce matin, ainsi que leur mère Juman et leur grand-mère, dans un bombardement israélien qui a ciblé un appartement résidentiel à Deir al-Balah, dans le centre de la bande de Gaza.

Après avoir quitté l’appartement pour obtenir un certificat de naissance pour ses deux nouveau-nés, le père des nourrissons est revenu pour découvrir que tous les membres de sa famille, y compris la grand-mère des jumeaux, avaient été tués dans une attaque israélienne contre l’immeuble [l’appartement ciblé est situé au 7ème étage de l’immeuble, NdT].

Malgré ses capacités technologiques avancées, l’armée israélienne cible des maisons et des centres d’accueil en sachant pertinemment qu’ils abritent des civils, notamment des femmes et des enfants. L’armée israélienne bombarde néanmoins ces cibles avec des bombes et des missiles hautement destructeurs, dans le but de provoquer le plus grand nombre possible de morts et de blessés graves parmi la population civile. En témoignent les attaques systématiques, généralisées et répétées de l’armée israélienne contre les civils dans la bande de Gaza, ainsi que l’utilisation d’armes hautement destructrices et aveugles, en particulier contre les zones à forte densité de population civile.

Le cas des deux bébés Aser et Aysal n’est pas unique : des rapports quotidiens font état de victimes parmi les enfants, y compris des nourrissons, dans la bande de Gaza.

L’un des témoignages les plus marquants est celui d’Abdul Hafez Al-Najjar, 42 ans, père d’un enfant prénommé Ahmed, qui figurait parmi les nombreuses victimes d’un massacre israélien le 26 mai. Le massacre visait des personnes déplacées vivant dans des tentes dans la zone de Barksat, à l’ouest de Rafah, dans le sud de la bande de Gaza. Ahmed, ainsi que trois de ses frères et leur mère, figuraient parmi les nombreuses autres victimes qui ont toutes été décapitées et tuées. Le père d’Ahmed a déclaré à l’équipe Euro-Med : « Mon enfant Ahmed était très beau. Il avait un an et demi. Il a été décapité lors des bombardements israéliens. Sa tête a été séparée de son corps. Quand je l’ai vu, j’ai ressenti de la détresse. Il a été enterré sans sa tête. » Selon l’équipe d’Euro-Med Monitor, une frappe aérienne israélienne sur le quartier Al-Salam de Rafah, dans le sud de la bande de Gaza, a tué une autre paire de jumeaux le 3 mars. Wissam et Naeem Abu Anza, six mois, ont été tués par la frappe, ainsi que leur père et 11 autres membres de la famille.

La mère de Wissam et Naeem, Rania Abu Anza, a déclaré qu’elle avait lutté pendant 10 ans pour devenir mère avant de finalement donner naissance aux deux bébés. « Ils ont implanté trois embryons en moi, deux d’entre eux sont restés, et ils étaient là », a-t-elle expliqué. « Ils ont bombardé la maison, tuant mon mari, mes enfants et le reste de la famille dans le massacre. » Il y a dix jours, cela faisait six mois depuis la mort des jumeaux.

Shaimaa Al-Ghoul, quant à elle, était enceinte de neuf mois lorsque sa maison dans la ville de Rafah, dans le sud, a été bombardée le 12 février. Son mari et ses deux fils, Mohammed et Janan, ont été tués, et elle a été blessée par des éclats d’obus qui ont pénétré son abdomen, transpercé son utérus et se sont finalement logés dans le fœtus.

Al-Ghoul a déclaré qu’avant la mort de son mari et de ses deux enfants, son mari, Abdullah Abu Jazar, lui avait préparé « des dattes, des bonbons et un sac [cadeau] pour célébrer son nouveau-né à venir ». Elle a déclaré qu’elle avait donné naissance à un enfant, qu’elle avait appelé Abdullah, du nom de son père, mais que le garçon n’avait vécu qu’un jour. Le bébé Abdullah est mort de la blessure causée par les éclats d’obus qui avaient pénétré sa mère. Ainsi, Al-Ghoul a perdu son mari et ses trois enfants.

Euro-Med Monitor note que de nombreux nouveau-nés sont morts dans les hôpitaux au cours des 10 derniers mois en raison du manque d’oxygène et d’électricité, de soins inadéquats et du ciblage des hôpitaux.

Israël continue de tuer des milliers d’hommes et de femmes palestiniens dans la bande de Gaza, la plupart d’entre eux en âge de procréer, y compris des femmes enceintes, et des milliers d’enfants, y compris des nourrissons et des tout-petits. Selon la définition donnée aux actes de génocide au sens de l’article 2 de la Convention pour la prévention du crime de génocide, il ne fait aucun doute que les massacres systématiques et généralisés perpétrés par Israël contre des civils palestiniens, qui représentent au moins 92 % du nombre total de morts dues au génocide, auront un impact négatif sur les taux de croissance démographique et la capacité de reproduction des Palestiniens de la bande de Gaza pour les générations à venir. Environ 50.000 Palestiniens, dont des milliers coincés sous les décombres pendant des périodes suffisamment longues pour être désormais présumés morts, ont été tués par Israël depuis le 7 octobre. En outre, 88.000 autres Palestiniens ont été blessés par Israël depuis lors. Ces morts et ces blessures affecteront sans aucun doute les Palestiniens en tant que groupe national et ethnique pendant plusieurs générations.

Chaque jour, des décès d’enfants en bas âge sont signalés dans la bande de Gaza, conséquence directe des crimes israéliens qualifiés juridiquement d’actes de génocide, notamment la famine, la soif, le blocage de l’entrée de produits de première nécessité comme le lait et la privation de soins médicaux. La majorité de ces décès d’enfants ne sont pas inclus dans le décompte officiel des victimes publié par le ministère palestinien de la Santé, car il n’existe pas de système spécifique pour identifier ces victimes.

En raison du crime de génocide commis par Israël depuis 10 mois, les enfants palestiniens de la bande de Gaza sont privés de leurs droits fondamentaux et ne sont protégés d’aucune manière par le droit international. Ils sont devenus les cibles principales, directes et délibérées de l’armée israélienne, et ont même été victimes de meurtres prémédités et d’exécutions directes.

En plus d’être détenus arbitrairement, les enfants palestiniens ont également été victimes de crimes d’agression sexuelle, de disparition forcée, de torture et d’autres formes de traitement inhumain, de famine, de siège, de graves dommages psychologiques, de privation d’éducation en raison de la destruction généralisée des écoles et de refus d’accès aux soins de santé et à d’autres nécessités de la vie. De nombreux enfants palestiniens sont également victimes de la dispersion de leurs familles et ont perdu les soins de leurs parents.

Sila, 12 ans; souffre de plusieurs fractures du crane et a besoin d’un traitement urgent à l’étranger.

L’un des principaux objectifs du génocide israélien est de laisser un héritage durable de ces crimes qui affectera les victimes pour le reste de leur vie. La majorité des enfants palestiniens de la bande de Gaza ont subi un traumatisme psychologique qui sera probablement difficile à traiter.

Des milliers d’enfants ont perdu un ou leurs deux parents, ont été amputés de membres, ont subi de graves brûlures ou d’autres blessures graves, et/ou ont souffert de faim, de malnutrition et de déshydratation, ce qui aura un impact négatif sur leur développement physique et psychologique.

La plupart des enfants de la bande de Gaza ont perdu leur maison, leur sécurité financière et des membres de leur famille, en plus d’être privés d’éducation. Cela aura des conséquences graves et profondes sur leur avenir et leur capacité à jouir de leurs autres droits, les rendant plus vulnérables à la pauvreté, au chômage et à l’exploitation. Les attaques militaires israéliennes contre la bande de Gaza ont provoqué la destruction généralisée d’objets civils, notamment des maisons, des biens privés, des moyens de subsistance, des moyens de production et du système économique et commercial, forçant les Palestiniens à migrer, directement ou indirectement.

La communauté internationale doit agir rapidement et résolument pour mettre un terme au crime de génocide, protéger la vie de tous les enfants palestiniens de la bande de Gaza, empêcher Israël de transformer la bande de Gaza en le plus grand cimetière d’enfants de l’histoire moderne et mettre fin aux deux poids deux mesures flagrants appliqués à Israël et à ses puissants soutiens et alliés occidentaux.

Israël et ses soutiens doivent être tenus responsables de leurs violations flagrantes du droit international humanitaire en tuant et en ciblant des enfants palestiniens et en leur refusant l’accès à la nourriture, au logement, aux vêtements et à l’assistance médicale, y compris aux vaccinations, comme le précisent les Conventions de Genève et leurs deux Protocoles de 1977 – des protocoles qui devraient leur permettre de faire valoir leurs droits.

Article original en anglais sur Euromedmonitor / Traduction MR