L’armement des milices israéliennes prépare le terrain à un terrorisme général contre les Palestiniens

Ameer Makhoul, 14 février 2023. Israël a récemment introduit ce qu’il considère comme une arme mortelle pour imposer son hégémonie sur la patrie du peuple palestinien : la légalisation de la possession d’armes à feu pour sa population juive.

Il s’avère que ceux qui se présentent en masse pour soumettre des demandes de possession d’armes à feu sont des partisans du parti d’extrême-droite Otzma Yehudit (pouvoir juif), qui constitue depuis des milices qui opèrent dans le Naqab (Negev) et le long la côte.

Leur slogan – également adopté par les colons juifs et leurs gangs terroristes tels que la « jeunesse des collines » – est de « rétablir l’ordre ». Il ressort clairement des archives publiques que la majorité des demandeurs de permis d’armes à feu sont ces mêmes colons.

Depuis la nomination d’Itamar Ben-Gvir au ministère de la Sécurité nationale – avec le soutien du Premier ministre Benjamin Netanyahu – et à la suite des deux incidents à Jérusalem le 27 janvier, c’est comme si le mélange instable de violence d’État et de rue s’était entremêlé en un seul système.

Cependant, ce projet de loi n’a pas été initié par Ben-Gvir, mais il avait été fortement promu par l’ancien ministre de la Sécurité publique, Gilad Erdan. Les discussions à ce sujet se sont intensifiées à la suite du soulèvement de Karamah (« dignité ») en mai 2021, certains hommes politiques faisant pression pour que soit une question de politique d’État.

En effet, l’Etat israélien a toujours bien accueilli la violence des gangs armés, chaque ministre israélien, sous la responsabilité de son ministère respectif, violant de manière flagrante les droits des Palestiniens.

Cette atmosphère permet aux gangs armés de violer, eux aussi, ouvertement les droits des Palestiniens, créant tout un système de coupables qui ne rendent aucun compte et qui présentent leurs actes de terrorisme comme des émeutes entre deux parties égales en statut et en responsabilité.

Cette violence des gangs change également les règles selon lesquelles les victimes de ce racisme incontrôlable ne sauront pas qui les agresse, ni quel parti, tandis que la police et le Shin Bet ne rendront responsables que les victimes, les soumettant à des procès injustes et des condamnations.

Guérilla

La guérilla a toujours fait partie de l’histoire sioniste en Palestine – définie comme une guerre non conventionnelle menée contre une armée permanente conventionnelle dans des circonstances profitables aux groupes de guérilla.

C’est le même type de guerre, limitée mais ininterrompue et à long terme, menée par des mouvements révolutionnaires contre des régimes oppressifs avec des armées qui les dépassent plusieurs fois en nombre. Ils ont adopté ces stratégies dans le but d’épuiser le système oppressif et le renverser.

Dans les années 1970, après la défaite des armées arabes en 1967, le Mouvement de libération nationale palestinien a été considéré comme faisant partie de la résistance révolutionnaire de guérilla qui a mis la question palestinienne au premier plan, consacrant le droit du peuple au retour, ainsi que sa libération et son auto- détermination.

Les institutions de sécurité et de recherche israéliennes ont dépensé d’énormes sommes d’argent pour comprendre le mouvement et son impact.

Les colons sionistes en Palestine, passés et présents, ont utilisé la guérilla à leurs propres fins coloniales. Afin de contrôler, d’occuper la terre et d’expulser la population indigène, ils s’infiltraient dans les communautés palestiniennes en se faisant passer pour des « musta’arabin » arabes vivant parmi eux.

Ils présentaient leurs tactiques comme servant un mouvement de libération contre les « envahisseurs » palestiniens et qualifiaient la guérilla palestinienne et l’autodéfense de « terrorisme ».

Crimes historiques

En 1948, des gangs juifs tels que la Haganah ont assumé le rôle d’une armée d’État, mais ont fait ce qu’une armée régulière ne pouvait pas entreprendre : occuper des villes et déplacer leur population.

Le rôle de ces gangs était de commettre des cambriolages et des pillages, et de s’emparer d’un grand nombre de maisons, de magasins, d’installations publiques, de mosquées, d’églises et de tous leurs biens.

Cette stratégie avait un double objectif : enrichir financièrement la communauté juive, y compris les soldats, et empêcher le retour des Palestiniens expulsés dans leurs maisons et leurs villes. S’ils revenaient, ils trouvaient leurs maisons saccagées et occupées par des pillards, voire complètement détruites.

Des Palestiniens inspectent une voiture en feu à côté de leur maison après qu’elle a été incendiée par des colons juifs, dans le village de Jalud, près de Naplouse, en Cisjordanie occupée, le 30 janvier 2023 (Reuters)

Ces gangs n’étaient soumis à aucune responsabilité juridique et leurs activités criminelles étaient en fait sanctionnées par l’État nouvellement créé. Un autre de leurs rôles était de lancer des attaques armées contre les Palestiniens, comme larguer des barils d’explosifs sur les marchés des villes côtières, les forcer à être déplacés, expulsés et nettoyés ethniquement.

Les universités israéliennes ont adopté à plusieurs reprises ce modèle de puissance et de violence à un niveau industriel : des attaques meurtrières y ont été organisées contre des étudiants arabes dans les années 1970 et 1980, alors que les forces de police et le Shin Bet étaient pleinement intégrés.

Lorsque les étudiants arabes se sont organisés, la police et les forces de sécurité lourdement armées, accompagnés de gangs terroristes, ont pris d’assaut leurs universités. Alors que la droite fasciste attaquait des étudiants arabes à coup de chaînes et de couteaux, la police se tenait là, spectatrice.

La police, les gangs de droite, le Shin Bet et les gardes des universités ont fusionné en une seule unité lors des affrontements avec les étudiants. Ces groupes sont entrés sur les campus universitaires et comme ils ne faisaient pas partie des étudiants, ils n’ont pas été soumis à des tribunaux disciplinaires et personne ne les a interrogés.

Armer les milices

Cette tendance s’est également manifestée lors du soulèvement d’al-Karamah (dignité), où la police et les gangs armés se sont associés pour réprimer les manifestations palestiniennes. Les gangs se sont comportés comme l’arme extralégale de la police, menant des attaques de quartier, des invasions de domicile et des attaques physiques contre des résidents sans défense.

Plus de 3.000 Palestiniens arabes qui défendaient leurs quartiers ont été arrêtés, des centaines faisant face à des inculpations et à des peines sévères, tandis que l’État israélien fermait les yeux sur ces gangs terroristes.

Au lendemain du soulèvement d’al-Karamah, le parti Otzma Yehudit a introduit le projet d’établir des milices terroristes semi-officielles et permanentes, à partir du Naqab et de Beersheba jusqu’aux villes côtières.

Les dirigeants du parti fasciste se sont organisés aux côtés des municipalités et de la police sous prétexte de rétablir « l’ordre public » mais, en réalité, ont mené une guerre judiciaire contre les citoyens palestiniens d’Israël.

Afin d’empêcher une répétition du soulèvement d’al-Karamah, le gouvernement israélien a préparé la mise en place d’une « Garde nationale » composée de milliers de volontaires formés dans les unités de combat de l’armée d’occupation. Son objectif est de soutenir les efforts de la police dans le ciblage et la répression des communautés palestiniennes de 1948 tout en protégeant les forces qui judaïsent le Naqab.

La récente décision de Ben-Gvir de distribuer des armes sous licence israélienne – soutenue par Netanyahu – à la population israélienne juive est dangereuse pour les Palestiniens. Cela menace leur existence et révèle le mépris du gouvernement pour leur vie et leurs droits.

Cela crée une atmosphère propice aux crimes racistes et au nettoyage ethnique, et il est peu probable que la décision soit annulée lors d’un changement futur dans la coalition au pouvoir.

Cette nouvelle politique de distribution d’armes aux Israéliens juifs encouragera davantage les milices armées à menacer la vie des Palestiniens et à violer leur sécurité et leurs droits, tout en évitant toute responsabilisation.

En fin de compte, le gouvernement israélien dirigé par Netanyahu et sa coalition d’extrême-droite porteront la responsabilité d’avoir soumis les Palestiniens à la terreur de cette guérilla étatique.

Article original en anglais sur Middle East Eye / Traduction MR

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