Le retour des Etats-Unis à l’UNESCO jouera en faveur d’Israël

Ramona Wadi, 15 février 2022. En 2017, l’administration Trump a annoncé son retrait de l’Organisation des Nations unies pour l’éducation, la science et la culture (UNESCO), invoquant « des arriérés croissants à l’UNESCO, la nécessité d’une réforme fondamentale de l’organisation et la persistance d’un parti pris anti-israélien à l’UNESCO. » Quelques heures plus tard, Israël a fait de même, le Premier ministre israélien de l’époque, Benjamin Netanyahu, décrivant l’organisation comme « un théâtre de l’absurde. » L’ambassadeur israélien à l’ONU de l’époque, Danny Danon, a opiné : « Aujourd’hui est un nouveau jour à l’ONU où il y a un prix à payer pour la discrimination contre Israël. » Le 1er janvier 2019, les États-Unis et Israël ont officiellement quitté l’organisation.

L’art de la broderie en Palestine, inscrit en 2021 sur la Liste représentative du patrimoine culturel immatériel de l’humanité.

L’année dernière, cependant, les États-Unis ont annoncé leur intention de réintégrer l’UNESCO, « pour contrer l’influence chinoise ou promouvoir d’autres intérêts américains », rapporte Reuters. Le Jerusalem Post ajoute qu’Israël n’a pas l’intention de réintégrer l’Organisation, bien que l’année dernière, le ministre des affaires étrangères Yair Lapid ait envisagé de suivre les traces des États-Unis, affirmant que l’absence d’Israël à l’UNESCO n’avait aucun effet sur le « parti pris anti-israélien ». Il a également admis que la décision d’Israël de quitter l’UNESCO rendait difficile l’influence de la politique étrangère.

Pour réintégrer l’UNESCO, le Congrès américain devrait renoncer à une loi qui empêche Washington de financer les organisations internationales qui acceptent l’Autorité palestinienne comme membre à part entière. La décision des États-Unis aurait été influencée par le changement d’approche de l’UNESCO à l’égard d’Israël, tandis que l’Amérique devrait contrer tout parti pris anti-israélien, à la suite de discussions entre des responsables israéliens et américains.

Israël s’est opposé aux désignations par l’UNESCO de sites du patrimoine palestinien, qu’il décrit comme un effacement de l’histoire et de la mémoire. Peu importe qu’Israël se soit construit sur le nettoyage ethnique des Palestiniens et l’effacement de leur mémoire collective et de leurs sites. L’effacement le plus important et le plus évident dans la mémoire israélienne est sans doute le fait que l’État colonial n’existait pas avant la Nakba (Catastrophe) de 1948 et que ni les Palestiniens ni l’UNESCO ne peuvent être blâmés pour avoir désigné comme « palestiniens » des sites du patrimoine palestinien qui datent de bien avant la création d’Israël.

De plus, accuser l’UNESCO de partialité anti-israélienne ne suit aucune logique, étant donné que l’UNESCO a reconnu des sites comme faisant partie du patrimoine israélien, y compris la « ville blanche » de Tel-Aviv, ce qui signifie que l’organisation a également légitimé les origines et l’existence coloniales violentes d’Israël. Si Israël décide de suivre la suggestion de Lapid, l’UNESCO augmentera certainement le nombre de sites du patrimoine attribués à Israël.

Pour l’instant, les États-Unis devraient ouvrir la voie au retour d’Israël, d’où l’insistance du gouvernement israélien à ne pas s’opposer à la décision de l’administration Biden de réintégrer l’organisme des Nations unies. Pendant ce temps, Israël cherchera à extorquer de nouvelles concessions, tout en prévoyant de revenir dans l’organisation et de condescendre à honorer l’UNESCO de sa présence, plutôt que de réapparaître en se réjouissant d’avoir colonisé et de s’être approprié davantage de terres, d’histoire et de mémoire palestiniennes.

Tout ce processus astucieux rend caduques les accusations d’Israël selon lesquelles les institutions internationales ont un « parti pris anti-israélien ». Toutes les institutions internationales ont légitimé les origines et l’existence d’Israël, malgré les violations du droit international et les crimes de guerre commis par les gangs paramilitaires sionistes avant 1948, et sous les uniformes des « Forces de défense israéliennes » depuis lors et jusqu’à aujourd’hui.

Le fiasco du départ et l’insinuation du retour est un stratagème pour un gain colonial, et pour que ce gain soit reconnu par des résolutions et des déclarations internationales. Le retour des Etats-Unis à l’UNESCO jouera donc en faveur d’Israël. Ils ne le feraient pas autrement.

Article original en anglais sur Middle East Monitor / Traduction MR

[writers slug=ramona-wadi]